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10 août 2019 6 10 /08 /août /2019 16:18
Une fleur éclot dans la nuit de Maxime Patry (L'Age d'Homme)

Une fleur éclot dans la nuit de Maxime Patry

(L'âge d'homme - Collection "Littératures" - 137 pages - mars 2019)

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Un titre éminemment poétique pour un premier roman d'un jeune auteur normand, Maxime Patry, titulaire d'un "Master ès Lettres", assorti d'une publication chez un éditeur de prestige "L'âge d'homme".

Tout pour m'avoir donné envie d'accepter un exemplaire de la part de l'auteur pour lire le livre et en parler ainsi sur le blog.

Le roman nous entraîne dans un étrange pays : Terracognita.

Et l'auteur présente ainsi la première partie du roman, à la manière des romans du XIXe siècle :

 

Ce qu'il en est de Securù, de ce garçon à l'avenir prompt et fier d'homme, c'est précisément ce que nous voulons savoir et dire. Ainsi la parole doit naître : il faut laisser se dérouler ce flux incertain, une voix légère comme un vent se déploie, venue de l'invisible.
Ce que nous voulons, c'est laisser venir les mots comme la rivière creuse son sillon et s'enfonce dans les strates toujours plus profondes et inconnues des vies.
De ce flot naissant jaillissent de plus anciennes paroles à travers les voix des vivants. Pour comprendre,il nous faut les écouter.

Laissons donc venir les mots et nous familiariser avec Terracognita et le "héros" du roman Securù au fil des pages.

Retour aux origines de ces terres dominées par un désert, une forêt et la mer, composées également d'un Domaine des Dieux, des Chemins sacrés, une mangrove et une ville, comme nous le montre une carte.

Puis apparaît Securù. Il travaille sur le port et rêve comme tous les habitants de l'île de naviguer. 

Un soir, il aperçoit une belle femme à la poitrine nue, évanescente. Elle semble venir du navire à quai, "La Vierge des Mers". Au matin, le navire est prêt à appareiller, alors Securù se propose à embarquer et il est accepté.

Son rêve, qui est aussi une réalité chez les insulaires, de naviguer se réalise mais son objectif est de revoir cette femme.

Seulement, il comprend très vite qu'elle est l'épouse du Capitaine et il la protège des autres marins en la cachant soigneusement au regard de ces hommes.

Sauf qu'il parle de vouloir la rencontrer, et quand le second, Marsile, en parle au Capitaine tout se complique pour lui. Il est mis aux arrêts et enfermé dans une geôle, avec interdiction de descendre du navire lors des escales. Une seule compensation, il fait les comptes et peut donner des conseils de "rentabilité" au Capitaine.

Pourra-t-il espérer quand même revoir cette femme? Tout le roman est bâti sur cette énigme.

J'ai pensé au roman de jack London : "Le loup des Mers" où il y a également une telle confrontation entre un Capitaine de navire et un jeune homme novice qui finit par beaucoup apprendre à son contact et progresser, au point d'arriver, non sans violence, "presque" à une complicité entre eux.

Un beau premier roman suffisamment court pour ne pas lasser le lecteur en lui disant l'essentiel de l'histoire.

On ne s'ennuie pas un instant et on se sent vivre aux côtés de Securù dans ce "huis-clos" promis au rêve et à l'angoisse tout autant.

Une belle découverte et encore merci à l'auteur de m'avoir proposé son livre à ma lecture.

Bonne lecture,

Denis

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30 juillet 2019 2 30 /07 /juillet /2019 16:48
Journal des Goncourt : fin de la préface et début du journal le 2 décembre 1851 (épisode 2)

La semaine dernière, j'ai annoncé la lecture du Journal des Goncourt

Ci-dessous, fin de la préface :

"Ce journal a été commencé le 2 décembre 1851, jour de la mise en vente de notre premier livre, qui parut le jour du coup d'état.
(...) Mon frère mort, regardant notre oeuvre littéraire comme terminée, je prenais la résolution de cacheter le journal à la date du 20 janvier 1870, aux dernières lignes tracées par sa main. Mais alors j'étais mordu du désir amer de me raconter à moi-même les derniers mois et la mort du pauvre cher, et presque aussitôt les tragiques épisodes du siège et de la Commune m'entraînaient à continuer ce journal, qui est encore, de temps en temps, le confident de ma pensée"
Edmond de Goncourt (Schliersee, août 1872)

"(...) Je demande enfin au lecteur de se montrer indulgent pour les premières années, où nous n'étions que d'assez imparfaits rédacteurs de la "note d'après nature ; puis il voudra bien songer aussi qu'en ce temps de début, nos relations étaient très restreintes et, par conséquent, le champ de nos observations assez borné."
E de G

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Et ensuite le journal commence ainsi, comme annoncé par Edmond, le 2 décembre 1851 :


"Au jour du jugement dernier, quand les âmes seront amenées à la barre par de grands anges, qui, pendant les longs débats, dormiront, à l'instar des gendarmes, le menton sur leurs deux gants d'ordonnance, et quand Dieu le père, en son auguste barbe blanche, ainsi  que les membres de l'Institut le peignent dans les coupoles des églises, quand Dieu m'interrogera sur mes pensées, sur mes actes, sur les choses auxquelles j'ai prêté la complicité de mes yeux, ce jour-là : "Hélas ! Seigneur, répondrai-je, j'ai vu un coup d'Etat !" "

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Denis

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27 juillet 2019 6 27 /07 /juillet /2019 16:03
Le Journal des Goncourt

Il y a bien longtemps que je veux lire cette "somme littéraire" des petits potins de la vie littéraire sous le regard des frères Goncourt (du moins du temps où ils ont été deux);

"Journal - mémoires de la vie littéraire"

Pour rappel :

Jules de Goncourt (1830-1870) (Principal auteur jusqu'à sa mort)

Edmond de Goncourt (1822-1896) (Poursuivi par Edmond après la mort de Jules

Il y eut un premier volume (1851-1861) publié chez Charpentier et Cie en 1887.

La préface de ce premier volume et donc du journal débute ainsi :

"Ce journal est notre confession de chaque soir : la confession de deux vies inséparées dans le plaisir, le labeur, la peine, de deux pensées jumelles, de deux esprits recevant du contact des hommes et des choses des impressions si semblables, si identiques, si homogènes, que cette confession peut être considérée comme l’expansion d'un seul "moi" et d'un seul "je".

Dans cette autobiographie, au jour le jour, entrent en scène les gens que les hasards de la vie ont jetés sur le chemin de notre existence. Nous les avons "portraiturés", ces hommes, ces femmes, dans leur ressemblances du jour et de l'heure, les reprenant au cours de notre journal, les remontrant plus tard sous des aspects différents, et, selon qu'ils changeaient ou se modifiaient, désirant ne point imiter les faiseurs de mémoires qui présentent leurs figures historiques, peintes en bloc et d'une seule pièce, ou peintes avec des couleurs refroidies par l'éloignement et l'enfoncement de la rencontre, - ambitieux, en un mot, de représenter l'ondoyante humanité dans sa "vérité momentanée"."

Je me lance dans cette longue aventure en version électronique sur tablette !

Denis

Le Journal des Goncourt
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19 juillet 2019 5 19 /07 /juillet /2019 16:40
Correspondance Camus - Chiaromonte (Gallimard)

Correspondance (1945 - 1959) entre Albert Camus et Nicola Chiaramonte

(Gallimard - mai 2019 - 233 pages)

Edition établie, présentée et annotée par Samantha Novello

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Une nouvelle correspondance d'Albert Camus vient de paraître après la "monumentale"(au propre et au figuré) correspondance amoureuse entre Camus et Maria Casares.

Ce sont ici 91 lettres échangées entre les deux hommes qui sont présentées ici.

On ne présente plus en France Albert Camus (1913-1960).

Par contre, qui était Nicola Chiaramonte?

 

 

Issu d'une famille de la moyenne bourgeoisie émigrée à Rome en 1908, fils de médecin, Nicola Chiaramonte est né le 12 juillet 1905 à Rapolla, en Basilicate, terre d'ancienne domination normande, arabe et grecque, devenue au début du XXe siècle "l'Irlande d'Italie" en raison de son dépeuplement. Lecteur passionné de Platon et des tragiques grecs, il revendiquait ses origines méditerranéennes et notamment grecques. Il meurt à Rome le 18 janvier 1972. (Note 1 de la préface p. 7)

Samantha Novello qui a travaillé sur cette correspondance précise que "L'échange de lettres entre Albert Camus et Nicola Chiaramonte est avant tout le témoignage, parfois ému et émouvant, de l'amitié si forte et si pudique qui lia ces deux hommes de 1941 à 1960, date de la mort de Camus.

Ils se sont rencontrés à Alger au printemps 1941 et ont tout de suite senti la force de leurs idées communes sur la violence et l'esprit  humain.

Chiaramonte, antifasciste, avait dû fuir l'Italie de Mussolini dès 1934. Il fut ami d'Alberto Moravia.

La majorité des lettres (environ 60) émane de l'italien. La correspondance est régulière entre 1945 et 1948. De 1949 à 1953, Chiaramonte s'installe à Paris où les deux amis se rencontrent régulièrement.

Puis l'italien rentre en Italie où il crée la revue "Tempo presente" et leur correspondance reprend jusqu'au décès de Camus.

Une nouvelle belle aventure littéraire et intellectuelle pour approfondir l'oeuvre de Camus et découvrir Nicola Chiaramonte que j'avoue ne pas connaître.

(...)Il est inutile que je vous dise avec quel respect et quelle admiration je suis (tant que je peux), votre oeuvre de journaliste (ce n'est pas le moindre désagrément de la situation présente que de ne pas pouvoir recevoir de livres de France). (...) Je vous admire et vous respecte... (Extrait de la lettre 1 du 8 août 1945 de Chiaramonte

Réponse de Camus (lettre 2 du 5 octobre 1945) (...) Maintenant que vous et moi avons renoué des liens, ne les laissons pas se détendre, voulez-vous? Je serai content de vous revoir. Mais en attendant, nous pouvons nous écrire. Dites-moi les livres que vous désirez, je sais un moyen de vous les faire parvenir.

Correspondance Camus - Chiaromonte (Gallimard)

Samantha Novello est enseignante de philosophie et d'histoire. elle est doctorante à l'université de Verone. Elle a collaboré aux volumes I et III des oeuvres complètes d'Albert Camus dans la Bibliothèque de la Pléiade.

Correspondance Camus - Chiaromonte (Gallimard)
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7 juillet 2019 7 07 /07 /juillet /2019 16:21
Les villages verticaux de Toufik Abou-Haydat (Le laboratoire existentiel)

Les villages verticaux de Toufik Abou-Haydar

(Le laboratoire existentiel - mars 2019 - 196 pages - collection l'Illuscript)

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L'éditrice Anne-Ségolène Estay a pris beaucoup de soins pour l'édition de ce roman, "illustré" des mains de l'auteur Toufik Abou-Haydar.

Il faut le signaler, tellement c'est devenu rare de trouver des livres agréables à tenir en main. C'est tout le mérite de ce "laboratoire existentiel", énigmatique nom pour un éditeur. Si vous cliquez sur "laboratoire existentiel" vous saurez tout sur ces deux mots mis en harmonie.

"Illustration" au cœur du livre et "artisanat" au centre de ses préoccupations peuvent être annoncés comme slogan qui prend tout son sens quand on tient le livre en main.

J'ai noté quelques imperfections dans le texte, toutefois, globalement j'ai apprécié l'histoire de ce roman sur fonds historique.

Quand Aïda était enfant, une voyante lui prédit qu'elle se marierait avec un prince charmant. 

Elle l'a attendu en vain et au moment de sa puberté, elle pouvait être mariée à tout moment selon les coutumes de son pays. Mais comme elle était belle, elle a dû se voiler pour cacher son visage. Et puis, un jour, dans la campagne, elle a été violée ce qui accéléré le cours de sa vie : il fallait absolument se marier pour effacer la "honte", ses parents devant même partir au Liban.

Aïda a tout perdu dans cette dramatique affaire : ses racines et sa famille.

Et puis, en février 2015, tout bascule en Syrie et dans le village d'Aïda. Son mari est arrêté et un médecin français, Marteneau, vient s'installer pour soigner les djihadistes.

Elle est obligée de se marier au mokhdar mais comme il veut s'assurer qu'elle n'est pas enceinte, il la met en "isolement" pendant 100 jours sous le contrôle de sa première femme, Tahiya.

Son histoire du "prince charmant" lui revient comme un boomerang quand on lui donne à lire "La princesse endormie".

Les cent jours arrivent à leur thème mais sa liberté n'est que conditionnelle et elle n'a qu'un espoir, c'est de s'échapper d'ici et de rejoindre sa famille au Liban.

Plusieurs personnes dont Tahiya vont tout faire pour que son espoir puisse devenir réalité.

Débute alors, une sorte de "road-movie" à travers le chaos syrien.

Comme l'annonce la 4e de couverture : "Quoi que tu fasses, le boomerang finit toujours par revenir dans ta main".

Un roman et plus encore un éditeur à découvrir.

Merci à Anne-Ségolène Estay de m'avoir adressé ce roman. J'avais dit que je serais honnête, donc je répète que ce roman a des défauts, avec des coïncidences de rencontres, par exemple, qui font penser aux contes. Mais, finalement, ce roman est peut-être un conte ! Je n'y avais pas pensé avant d'écrire ces lignes, tellement ce livre s'inscrit dans la triste réalité de la Syrie d'aujourd'hui.

Et puis il y a les illustrations qui vienne concrétiser les propos et en livrer leur "magie", sans oublier que le style est bien ciselé et donne de belles envolées lyriques.

Faites-vous donc votre propre opinion en lisant ce livre.

Bonne lecture,

Denis

Malgré sa prison en terre cuite, la présence du livre donnait à Aïda l'envie de sourire, de rire, de palpiter, de sauter de joie et de s'envoler comme jamais depuis longtemps. Le souvenir de la prédiction de la Bédouine en avait réveillé d'autres, comme un lac qui se remplit d'eau après une longue période de sécheresse : le village de son enfance ressurgissait sous ses yeux, elle courait de nouveau dans les ruelles du petit hameau, de ce minuscule point de la terre qui l'avait vue grandir et resplendir. (page 43)

Les villages verticaux de Toufik Abou-Haydat (Le laboratoire existentiel)
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13 mai 2019 1 13 /05 /mai /2019 16:18
Sans Silke de Michel Layak (Editions Zoé)

Sans Silke de Michel Layaz

(Editions Zoé - 157 pages - Janvier 2019)

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Le roman débute ainsi :

J'avais l'âge des métamorphoses récentes : dix-neuf ans. C'était le premier soir. Avant de m'endormir, j'ai ouvert la fenêtre. Rien. Pas un bruit. Dans le ciel, chaque étoile veillait sur son coin de terre. Seuls les pas d'un animal, ou le vent dans un feuillage, contrariaient le calme. A l'intérieur de la maison, le silence aussi. Pas le même. Plus lourd. Comme mis en boîte. Ce double silence exigeait d'être apprivoisé. Jusqu'alors, j'avais toujours vécu dans un immeuble, avec des routes proches et des avenues plus loin, avec en prime des clameurs de fête ou de dispute, avec des noctambules qui se déréglaient la raison. Ici, le premier village se trouvait à trois kilomètres, derrière la forêt ; et devant la maison, après le jardin et le verger, il y avait des champs, et plus loin encore, un bois qui bloquait le regard.

Et on est embarqué dans une histoire qui va nous attacher et ne pas nous quitter si facilement que cela quand les 150 pages auront été lues.

 

Avec un tel roman et avec des "moments" de vie de deux, trois pages, il faut humer les ambiances, se laisser porter par les mots. Car le texte est vraiment très, très beau. 

 

L'histoire est simple. Un couple qui vit à l'orée d'une forêt, loin du bruit, très fusionnel dans son amour, a presque oublié qu'il a une jeune enfant de 9 ans, Ludivine. Leur lieu de vie s'appelle "La Favorite".

 

Ils décident de l'aider dans ses études et devoirs, aussi ils ont passé une annonce pour recruter une étudiante, avec obligation de vivre dans la maison aussi près que possible de l'enfant.

 

Et c'est Silke qui sonne à la porte. Elle est embauchée sans avoir vu Ludivine. La mère dit que ce sera sans doute difficile de sortir sa fille de son enfermement. Mais Silke y croit, elle. Et aussitôt, elles s'entendent à merveille.

 

Ludivine adore la nature, les arbres. Elle entraîne Silke dans ses rêveries, des déambulations sans oublier de travailler quand il le faut, ce qui fait leur force, car on ne peut rien leur reprocher.

 

Le père est artiste plasticien, peintre mais il vit reclus à "La Favorite" et n'a aucun succès. C'est la mère qui rapporte les revenus et qui dynamise le couple, avocate de son état.

 

Ludivine reste en marge, encore et toujours. Silke est devenue son amie. Elles font quelques escapades, notamment, elles "s'offrent" une nuit à la belle étoile.

 

La quasi indifférence des parents est troublante, malgré des vacances à la neige passées ensemble.

 

Et le contraste entre l'amour réciproque des parents pour eux-mêmes et le rejet inconscient de leur fille contribue à créer un état proche de la violence, même si Ludivine n'a pas encore l'âge de vraiment se révolter, d'autant qu'elle a trouvé un certain équilibre grâce à sa relation privilégiée avec Silke.

 

Mais, les belles histoires finissent souvent mal...

 

A lire absolument,

Denis

 

Sans Silke de Michel Layak (Editions Zoé)
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10 mars 2019 7 10 /03 /mars /2019 21:25
Le musée imaginaire de Marcel Proust (Thames & Hudson)

Le musée imaginaire de Marcel Proust 

Tous les tableaux de "A la recherche du temps perdu" 

par Eric Karpeles (Thames & Hudson - 350 pages - 2009)

Traduit de l'anglais (USA) par Pierre Saint-Jean

206 illustrations

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Cet ouvrage est un guide des tableaux que le lecteur rencontre sur son chemin au fil de sa lecture du chef d'ouvre (n'oublions pas de le rappeler) de Marcel Proust : "A la recherche du temps perdu".

Dans son introduction Eric Karpeles rappelle que "Proust a essentiellement évoqué des tableaux que son expérience personnelle lui a permis de découvrir ; des oeuvres soigneusement étudiées pendant d'innombrables heures passées dans des musées, des galeries et des collections privées du XIXe siècle à Paris. (...) Néanmoins, Proust ne vit jamais en vrai un certain nombre des tableaux qui ont été incorporés dans les pages du roman".

"Proust choisit des peintres au sein du panthéon des maîtres : Vélasquez, Bellini, Ingres. Au bout d'une trentaine de pages seulement, Corot est le premier peintre mentionné, et plusieurs milliers de pages plus loin, Chardin est le dernier à être évoqué. (...) Proust suggère également des peintures d'une façon moins précise : par exemple pour Morel, le beau violoniste, qui a l'air d'une espèce de Bronzino. Il y a enfin des peintures fictives qui n'ont existé que dans l'imagination de Proust, comme l'étude à l'aquarelle réalisée par Elistir et représentant la jeune Odette de Crécy en "demi-travesti".

Il avait des peintres préférés : Mantegna, Rembrandt, Titien, Chardin.

Elstir serait un mélange de  Moreau, Degas, Turner, Renoir et Monet.

 

Eric Karpeles est peintre et écrit sur la peinture, la poésie et l'esthétique.

 

Deux exemples ci-dessous d'illustrations accompagnées du texte en référence :

  

La mère, Pieter de Hooch (1670)

La mère, Pieter de Hooch (1670)

"A son entrée, tandis que Mme Verdurin montrant des roses qu'il avait envoyées le matin lui disait :"je vous gronde" et lui indiquait une place à côté d'Odette, le pianiste jouait,pour eux deux, la petite phrase de Vinteuil qui était comme l'air national de leur amour. Il commençait par la tenue des trémolos de violon que pendant quelques mesures on entend seuls, occupant tout le premier plan, puis tout d'un coup ils semblaient s'écarter et, comme dans ces tableaux de Pieter de Hooch qu'approfondit le cadre étroit d'une porte entrouverte, tout au loin, d'une couleur autre, dans le velouté d'une lumière interposée, la petite phrase apparaissait, dansante, pastorale, intercalée, épisodique, appartenant à un autre monde". (Du côté de chez Swann)

Olympia, Edouard Manet, 1863

Olympia, Edouard Manet, 1863

Une odalisque, dite La grande odalisque, Jean-Auguste-Dominique Ingres, 1814

Une odalisque, dite La grande odalisque, Jean-Auguste-Dominique Ingres, 1814

"Pourtant les plus vieux auraient pu se dire qu'au cours de leur vie ils avaient vu, au fur et à mesure que les années les en éloignaient, la distance infranchissable entre ce qu'ils jugeaient un chef d'oeuvre d'Ingres et ce qu'ils croyaient devoir rester à jamais une horreur (par exemple l'Olympia de Manet) diminuer jusqu'à ce que les deux toiles eussent l'air jumelles." (Le côté de Guermantes)

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3 mars 2019 7 03 /03 /mars /2019 12:35
L'affaire Rose Keller de Ludovic Miserole (French Pulp Editions)

L'affaire Rose Keller - Les crimes du marquis de Sade : tome 1

de Ludovic Miserole

(French Pulp Editions - septembre 2018 - 400 pages)

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En forme de préambule : âmes sensibles, attention, les 50 premières pages vous plongent dans ménagement dans l'univers pervers de Donatien, marquis de Sade et risquent de vous choquer. Mais l'auteur reste pudique autant qu'il le peut, mais c'est un roman historique et il faut accepter de subir le choc des pratiques du marquis pour comprendre le contexte.

J'ai lu plusieurs commentaires de personnes qui ont arrêté le roman. Je réponds, non, il faut absolument continuer ce roman car il est efficacement construit et puis il répond parfaitement aux critères énoncés par l'éditeur :

French Pulp Editions : "Pulp,comme ces feuilletons d'autrefois, ces romans qui depuis des siècles remplissent notre imaginaire de détectives durs à cuir, de femmes fatales... Du roman noir à la saga familiale... Ils ont donné naissance à une littérature dynamique et généreuse, qui fait aujourd'hui le bonheur de tous grâce à des textes fluides et percutants".

Avec ce roman, on est vraiment pris dans cette "dynamique fluide et percutante". J'ai pris un très grand intérêt à lire cette sordide histoire.

Nous sommes le dimanche 3 avril 1768. Rose Keller est une jeune veuve alsacienne et pour survivre mendie dans les rues de Paris. Elle est abordée par Sade (1740-1814) sans savoir quel est cet homme distingué. Il lui promet de l'argent si elle vient faire son ménage à sa maison d'Arcueil. Elle accepte bien volontiers. Mais, là-bas il n'est plus question de ménage mais de sévices corporels et sexuels dont elle se remet très mal compte tenu des maux infligés tant à son corps qu'à son esprit.

Dans le même temps, une prostituée, Julie dite Follecuisse (un des personnages fictifs du roman),est à la recherche du marquis dont elle a été victime. Elle espère retrouver Sade pour le tuer afin de sauver les prochaines jeunes femmes qui tomberont entre ses mains. Mais en route elle est prise à partie par une bande de voleurs conduite par Daniel Holtelano, qui vient de tuer un aubergiste. Daniel viole sans complexe Julie devant ses complices et la veuve de l'aubergiste;

Une troisième femme est concernée par le marquis et c'est sa jeune épouse, Renée Pélagie (1741-1810). Elle l'aime et lui pardonne tous ses excès dont elle est parfois elle-même victime. Seulement ce qui va s'appeler "l'affaire Rose Keller" risque "d'éclabousser" la réputation des parents de Renée. Déjà qu'il y avait eu l'affaire Jeanne Testard, quelques années auparavant, qui avait valu un séjour du marquis à la prison de Vincennes.

Tout doit être fait pour étouffer l'affaire. C'est ce à quoi la mère de Renée va s'adonner, tandis que de son côté Rose Keller, évadée et recueillie par des habitants d'Arcueil va tout faire, aidée par Julie qui a eu vent de l'affaire et qui a réussie à l'approcher, pour condamner Sade.

C'est ce duel à distance qui est conduit dans le roman avec à l'appui des documents inédits retrouvés par Ludovic Miserole dans des archives publiques ou privées. Qui l'emportera dans cet Ancien Régime où la noblesse avait beaucoup plus de pouvoirs que les "petites gens"?

Je vous recommande une nouvelle fois de lire ce roman historique bien construit, très bien écrit, fluide et passionnant pour suivre ces trois femmes, dont deux qui ont réellement existé... une plongée glaçante dans ces années de fin de règne de Louis XV (1710 - 1774), sollicité dans cette histoire par ailleurs.

En attendant la deuxième histoire des "crimes du marquis"... qui devrait nous conduire du côté de Marseille, en 1772, si l'on en croit wikipedia.

Bonne lecture,

Denis

Pour information, ce roman fait partie de la sélection du neuvième Prix du Balai d'Or 2019, orchestré par Richard Contin 

L'affaire Rose Keller de Ludovic Miserole (French Pulp Editions)
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7 février 2019 4 07 /02 /février /2019 20:49
Marcel Proust à 20 ans de Jean-Pascal Mahieu (Au Diable Vauvert)

Marcel Proust à 20 ans : le temps de la recherche 

de Jean-Pascal Mahieu

(Au Diable Vauvert - collection "à 20 ans" - janvier 2010 - 150 pages)

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Né le 10 juillet 1871 à Auteuil, Marcel Proust a 18 ans en 1889, quand il s'engage volontaire pour un an dans l'armée. Ainsi, il s'éloigne de sa mère qui l'a tant couvé jusque là. Mais il est asthmatique, bien peu sportif et son écriture est notée tellement alambiquée que l'armée n'a rien à faire d'un tel homme, en plus affable et poli. Là n'est pas son univers.

Marcel inquiète ses parents car il pratique la masturbation et plus encore il se révèle homosexuel. Et puis, il rêve de littérature alors que ses parents lui imposent un cursus de droit à son retour de l'armée. Il accepte contraint et forcé. Mais les Weil, du côté de sa mère Jeanne, sont riches et il espère bien vivre de ses rentes pour avoir le temps d'écrire.

Il sort beaucoup à Paris et rencontre chez Madame de Caillavet, Anatole France (1844-1924) dont il aime les livres. France est amant de son hôte.

 

Anatole France

Anatole France

Chez Madame Strauss il rencontre Charles Haas qui prendra les traits de Swann plus tard. La comtesse de Chevigné, elle, deviendra Madame de Guermantes. Montesquieu sera Charlus...

Marcel fonde une revue en 1891, à 21 ans, "Le banquet" avec des amis. Il est alors en deuxième année de droit.

Marcel Proust à 20 ans de Jean-Pascal Mahieu (Au Diable Vauvert)

Trouville et Cabourg l'accueillent l'été Et il confirme par ses notes qu'il déteste le droit. et à 22 ans, il opte pour une licence de lettres contrariant une nouvelle fois son père.

En octobre 1894 éclate l'affaire Dreyfus. Marcel se montre tout de suite dreyfusard.

C'est le moment où il rencontre Reynaldo Hahn et il publie un premier livre "Les plaisirs et les jours" au Mercure de France, qui regroupe des nouvelles, des poèmes, des portraits et des pastiches.

 

Marcel Proust à 20 ans de Jean-Pascal Mahieu (Au Diable Vauvert)

Sa liaison avec Reynaldo Hahn dure deux ans puis il s'éprend de Lucien Daudet, le fils d'Alphonse Daudet.

Et il crée son propre salon chez ses parents, ce qu'ils n'apprécient guère d'autant qu'ils craignent des affrontements entre "ennemis" qu'il invite.

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Le sous-titre du livre : "Le temps de la recherche" montre bien l'esprit de Marcel Proust dans cette décennie des années 90 de ses 20 ans. Il se "cherche" et rencontre la majorité de ceux et celles qu'il fera apparaître dans son "grand oeuvre" : "A la recherche du temps perdu".

Pendant ces 150 pages, on se sent au plus proche du jeune écrivain et on voit tout se mettre en place.

Ce livre n'apprendra pas grand chose aux "proustiens" aguerris. Par contre, il sera passionnant à lire pour tous ceux qui veulent approcher Proust et en savoir plus sur la genèse de son oeuvre dans le Paris "mondain" de la fin du XIXe siècle.

Bonne lecture,

Denis

Marcel Proust par Jacques-Emile Blanche (1892)

Marcel Proust par Jacques-Emile Blanche (1892)

Marcel Proust à 20 ans de Jean-Pascal Mahieu (Au Diable Vauvert)
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13 janvier 2019 7 13 /01 /janvier /2019 17:40
La poésie française du XIXe siècle de Dominique Rincé (PUF - Que sais-je?)

La poésie française du XIXe siècle de Dominique Rincé

(PUF - Que sais-je? - 125 pages - septembre 1983)

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Cette collection devenue "mythique" permet d'apporter un éclairage en 125 pages sur tous les thèmes possibles et imaginables.

Ce livre fait ainsi le tour de la poésie du XIXe siècle autour de deux grands axes et courants littéraires :

- L'âge romantique (1820-1850) : Lamartine, Musset, Vigny, Hugo et Nerval

 

- L'âge de la contestation poétique (1850-1900) :

        a) La contestation parnassienne : Leconte de Lisle, Heredia, Sully Prudhomme (premier prix  Nobel de Littérature), Banville

 

          b) Le renouveau baudelairien

 

          c) Symbolisme et modernité : Lautréamont, Rimbaud, Verlaine, Mallarmé, Laforgue

Voilà un bon canevas de lecture de la poésie de ce siècle qui a su mettre ainsi la mettre à l'honneur.

Je ne peux résister à l'idée de reproduire ici une partie de la conclusion qui résume brillamment l'esprit des poètes du XIXe siècle :

Lyrique chez Lamartine, intimiste chez Verlaine, sérieuse chez Leconte de Lisle ou Moréas, mythique chez Nerval ou Hugo, dramatique chez Vigny ou Baudelaire, désinvolte chez Musset ou Laforgue, fantastique chez Lautréamont, expérimentale chez Rimbaud ou Mallarmé, la poésie du XIXe siècle aura épuisé tous les registres, tous les tons et toutes les formes qui s'offraient à elle. On pourra lui reprocher de n'avoir pas toujours échappé aux vieux démons du didactisme et de l'esthétisme gratuit, ou de s'être laissé tenter parfois par de nouveaux démons, q'ils s'appellent facilité ou hermétisme. Qu'importe ! Ce qui s'affirme durant tout le siècle, c'est l'essentialité de la parole poétique. (page 125)

Tout ou presque est dit dans cette phrase.

 

Il reste bien sûr à lire de la poésie pour se faire sa propre opinion et prendre du plaisir de lecture en priorité dans ce siècle foisonnant.

 

Je me ferai l'écho de mes lectures au fil de mes "rencontres" avec des poètes.

 

J'ai commencé hier avec un des précurseurs : Alphonse de Lamartine.

 

Je ne me limiterai pas aux poètes français. Byron, Heine, Lermontov, Maeterlinck ou Verhaeren entre autres ont écrit également des textes marquants.

 

A suivre...

Bonne lecture,

Denis

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