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21 janvier 2016 4 21 /01 /janvier /2016 19:45
Chanter la poésie : Baudelaire par Georges Chelon

Un poète : Charles Baudelaire (1821-1867)

Un chanteur : Georges Chelon (né en 1943)

Un poème : Le coucher du soleil romantique (Du recueil "Les fleurs du mal")

             Le coucher du soleil romantique

 

Que le soleil est beau quand tout frais il se lève,
Comme une explosion nous lançant son bonjour !
- Bienheureux celui-là qui peut avec amour
Saluer son coucher plus glorieux qu'un rêve !

Je me souviens ! J'ai vu tout, fleur, source, sillon,
Se pâmer sous son oeil comme un coeur qui palpite...
- Courons vers l'horizon, il est tard, courons vite,
Pour attraper au moins un oblique rayon !

Mais je poursuis en vain le Dieu qui se retire ;
L'irrésistible Nuit établit son empire,
Noire, humide, funeste et pleine de frissons ;

Une odeur de tombeau dans les ténèbres nage,
Et mon pied peureux froisse, au bord du marécage,
Des crapauds imprévus et de froids limaçons.

Les fleurs du Mal de Charles Baudelaire

 

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Je vous renvoie sur le site de Georges Chelon pour découvrir le travail fait pas le chanteur concernant la mise en CD des 141 poèmes des Fleurs du Mal (édition de 1861). Il s'agit d'un travail magistral :

http://www.georgeschelon.com/page/BAUDELAIRE.html

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17 janvier 2016 7 17 /01 /janvier /2016 18:00
Le chien des Baskerville de Sir Arthur Conan Doyle (Pocket)

Le chien des Baskerville de Sir Arthur Conan Doyle

(Pocket - 191 pages)
 Traduit de l'anglais par Maurice-Bernard Endrèbe

Titre original : The hound of the Baskerville

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Après avoir lu une aventure du journaliste Rouletabille ("Le mystère de la chambre jaune" de Gaston Leroux), je poursuis ma lecture des romans policiers des "origines" avec le mythique détective privé Sherlock Holmes inventé en Angleterre par Sir Arthur Conan Doyle à la fin du 19e siècle.

 

L’ensemble des aventures écrites par  Sir Arthur Conan Doyle comporte quatre romans et 56 nouvelles :

- Une étude en rouge - 1887 (roman)

- Le Signe des quatre - 1890 (roman)

- Les Aventures de Sherlock Holmes - 1892 (nouvelles)

- Les mémoiresde Sherlock Holmes - 1894 (nouvelles)

- Le chien des Baskerville - 1902 (roman)

- Le retour de Sherlock Holmes - 1950 (nouvelles)

- La vallée de la peur - 1917 (roman)

- Son dernier coup d'archet - 1917 (nouvelles)

- Les archives de Sherlock Holmes - 1927 (nouvelles)

Ainsi, les aventures de Sherlock Holmes et son acolyte le Dr Watson se sont étalées sur 40 ans.

On peut dire d'entrée de jeu que la mythique phrase "Elémentaire mon cher Watson" n'a pas été dite dans "Le chien des Baskerville" ni dans les autres textes. C'est le cinéma qui a donné une nouvelle vie au duo.

J'avoue avoir pris autant de plaisir à lire ce roman qu'avec Rouletabille. L'écriture est fluide et efficace et donne au lecteur l'envie d'avancer dans la lecture en suivant les pensées de Holmes et Watson. On sait que tout élément est important et servira plus tard à démêler l'histoire.

 

Le Dr Mortimer est venu rendre visite à Sherlock Holmes et lui parle de la malédiction des Baskerville. Plusieurs ancêtres ont été tués par une bête géante et le dernier en date est Charles mort récemment. Il a vu des traces non loin du cadavre de Charles mais n'en a parlé à personne. Il voudrait que Sherlock Holmes enquête d' autant que le dernier héritier Sir Henry arrive le lendemain. Et il faut absolument le protéger.

Quand Holmes et Watson voient le lendemain Henry, celui-ci leur montre une lettre anonyme qu'il a reçu à l'hôtel à Londres et qui lui dit de ne pas se rendre à son domaine. Les mots ont été découpés dans le Times.

Aucune piste sérieuse n'a pu être révélée il ne reste plus qu'à laisser partir Sir Henry à son domaine de Baskerville avec Watson car Holmes ne veut pas laisser seul le riche héritier compte tenu des menaces qui pèsent contre lui.

Alors que la nature du Devon est très attrayante Baskerville Hall est plutôt sinistre en cette saison, l'automne. Avant d' arriver ils apprennent qu'un dangereux criminel s' est évadé de prison. Et les Barrymore qui gèrent le domaine annoncent qu'ils ont l'intention de quitter les lieux même si leur famille est au service des Baskerville depuis si longtemps. La terrible mort de Charles leur donne l'envie de s' éloigner d' ici.

Le Dr Watson rencontre les Stapleton, frère et soeur. Sir Henry devient aussitôt ami avec eux et semble très sensible au charme fou de la jolie Melle Stapleton. Sinon pas d'évènements majeurs même si Mr Barrymore semble bien étrange.

Le frère Stapleton se montre très jaloux. Quant à Barrymore il ravitaille la nuit le frère de sa femme qui n'est autre que le meurtrier évadé. Watson et Henry partent à la poursuite de l'homme sans pouvoir le rattraper. Alors ils entendent un lugubre hurlement de chien et Watson aperçoit un homme dans la lande.

Un bout de lettre non brûlée retrouvée dans la cheminée après la mort de Charles a montré les initiales L.L. Et Watson retrouve la jeune femme Laura Lyons qui dit avoir eu besoin des bonnes grâces de Charles pour son affaire de divorce...

Alors que Watson est en charge de la "garde" de Sir Henry et qu'il fait ses comptes rendus à distance à Holmes, en fait le grand détective suit toute cette affaire depuis la lande de Baskerville, ce qui déçoit Watson qui se sent "dévalorisé". Mais tout reprend corps car ils se sont pas trop de deux à présent pour trouver l'énigme de ces morts liées à ce chien monstrueux venu des temps anciens.

N'hésitez pas à lire ce livre très bien écrit et qui vous transportera dans ce climat "glacial" du Devon loin du bruit et de la fureur mais dans la sphère d'un microcosme où chacun s'observe, loin d'être pour le meilleur.

Bonne lecture,

Denis

 

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14 janvier 2016 4 14 /01 /janvier /2016 19:29
Chanter la poésie : Aragon par Marc Ogeret

Un poète : Louis Aragon

Un chanteur : Marc Ogeret (né en 1932)

Un poème :

Il faisait si beau ce matin

Mais dans la maison tiède et douce
Où sous le toit de tuiles rousses
Un enfant nu dort sur son lit
Le petit poste en galalithe
Dit soudain des mots insolites
Qu'on croyait tombés dans l'oubli

La fenêtre obscure est ouverte
Au contre-jour de vignes vertes
Où le vent pousse le rideau
Ses contrevents pâles s'accrochent
Au mur qui s'appuie à la roche
Avec un figuier dans son dos

On entend marcher sur la sente
Sans doute la mère est absente
Qui laissa son fils endormi
Et c'est comme un essaim de mouches
Ces vocables d'aucune bouche
L'enfant se retourne et gémit

Sans oreilles à ces paroles
L'ombre fait le maître d'école
Devant la cuvette et le broc
Et leur dit comme un fait vulgaire
Qu'à l'aurore aujourd'hui la guerre
A levé son front de taureau

Il faut recommencer qu'on meurt
Des gens dormaient dans leurs demeures
Comme ici dort cet enfant-là
L'armoire se tait, mais la porte
Proteste : Après tout, que m'importe
Ça se passe au Guatemala

Je saisis mal toutes ces choses
Notre voisine est peinte en rose
Il faisait si beau ce matin
Sur la terrasse on pouvait voir
Sécher du linge et des bas noirs
Devant les volets bleus déteints

Louis Aragon

 

 

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13 janvier 2016 3 13 /01 /janvier /2016 18:46
Le mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux (Livre de Poche

Le mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux

(Livre de Poche - 281 pages)

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Avec ce personnage de Roubetabille, je commence un petite série de héros de romans policiers, des "origines" à nos jours.

Joseph Rouletabille est journaliste. Il n'a donc rien du "héros" typique des romans policiers : ni flic, ni détective privé. Non, il est tout jeune homme de 18 ans quand il apparait par son auteur Gaston Leroux (1868-1927) dans la première enquête "Le mystère de la chambre jaune".

 

La série de romans consacrés à Rouletabille en comporte 8 :

- Le Mystère de la chambre jaune (1908)

- Le parfum de la dame en noir (1908)

- Rouletabille chez le Tsar (1913)

- Le château noir (Rouletabille à la guerre I) (1916)

- Les Etranges Noces de Rouletabille (Rouletabille à la guerre II) (1916)

- Rouletabille chez Krupp (1920)

- Le crime de Rouletabille (1922)

- Rouletabille chez les bohémiens (1923)

 

"Le mystère de la chambre jaune" a été adapté 4 fois au cinéma entre 1913 et 2003, la dernière étant de Bruno Podalydès.

Une bande dessinée a également été inspirée de ce roman en 1990. Et Tintin aurait pu être inspiré par Rouletabille.

Il est très pertinent ce très jeune journaliste et il fouille partout, observe tout pour arrriver à démêler des affaires bien compliquées. Et celle du "mystère de la chambre jaune" est bien étonnante. Comment un assassin peut-il sortir d'une chambre close ?

 

On apprend le 25 octobre 1892 qu'un crime a été commis dans la chambre jaune où dormait la fille du célèbre scientifique Stangerson. Deux coups de revolver ont été tirés mais par où a pu repartir l'assassin? Ni par la porte ni par la fenêtre assurément.

Sainclair le narrateur est avocat au barreau et il a connu Joseph Joséphin au surnom de Rouletabille, alors jeune reporter âgé de 18 ans, remarqué pour sa perspicacité. Ce matin il vient chercher son ami pour se rendre au château où a eu lieu le drame.

Ils font le trajet dans le compartiment du juge M. de Marquet qui dit que l'agresseur aurait pu passer par la fenêtre du vestibule.

La jeune femme devait se marier officiellement avec Robert Darzac. Sur les lieux est arrivé Frédéric Larsan éminent policier en poste à Londres spécialisé dans les dossiers compliqués.

Il demeure qu'il est impossible d' imaginer comment a pu sortir l'assassin ? Rouletabille inspecte scrupuleusement le sol et y voit une goutte de sang. Dans la chambre il observe la trace de main ensanglantée sur le mur et sur la porte. Sous le lit il trouve un cheveu de femme blonde. L'assassin n'a pas pu sortir de la chambre par ses voies naturelles.

Le juge a pu interroger Melle Stangerson qui a repris quelque peu connaissance et qui ne révèle pas grand chose car elle n'a pas vu de face son agresseur. Elle a tiré avec le révolver de l'employé de son père, Jacques qu'elle avait dérobé car elle entendait des bruits de pas la nuit depuis quelques jours.

Frédéric Larsan a observé l'étang de son côté. Rouletabille vient l'y rejoindre. Il constate que l'homme a changé de chaussures donc il n'a pas de complice. Et il est parti en bicyclette. Le journaliste découpe l'empreinte au format d' un papier et bizarrement elles ont la même forme que celles de Darzac.

Lors de la reconstitution des faits en présence de tous, Rouletabille s'invite en annonçant qu'il y a eu vol avant l'assassinat. Et de fait le professeur constate alors qu'on lui a volé tous ses documents de recherches. Or c'était sa fille qui détenait à son cou la clé. Il y a encore quelque chose qui cloche. C'est alors que Rouletabille révèle que la jeune femme avait perdu la clé et qu'elle offrait une belle récompense à qui la retrouverait via une annonce dans le journal. Larsan lui déclare que M. Stangerson connaissait l'assassin et qu'il l'aurait laisser partir quand il était seul devant la porte au moment de l'assassinat, ce qu'il nie aussitôt.

Étrangement Larsan tient beaucoup à une canne qu'il n'avait pas auparavant. Et après enquête auprès du vendeur à Paris ce serait Darzac qui l'aurait achetée le soir du crime lui donnant un vrai alibi d'avoir été absent du château le soir du crime.

Une lutte s'installe entre Rouletabille et le redoutable Larsan car chacun est en mesure de rivaliser avec l'autre de par le raisonnement et la perspicacité dans la résolution des énigmes et celle-ci est très corsée. Heureusement, la jeune femme a survécu à ses blessures. Mais il faut malgré tout retrouver le coupable.

Lisez ce livre, vous serez conquis par le style et la forme de la "dramaturgie" mise en oeuvre pour nous donner envie d'en savoir plus au plus vite. Le texte a plus d'un siècle et je trouve qu'il n'a pas vieilli. Il est devenu un classique incontournable. Vous verrez vous ne serez pas déçu par ce texte. Et vous aurez de l'empathie pour ce sympathique jeune journaliste capable d'enflammer un tribunal au moment où il arrive annonçant qu'il va révéler, de retour des Etats-Unis in extremis, le nom de l'assassin...

 

Bonne lecture,

Denis

 

Le mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux (Livre de Poche
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10 janvier 2016 7 10 /01 /janvier /2016 21:30

Salon organisé par l'association "Lire c'est libre"

Vous pouvez retrouver tous les détails de ce salon sur la page facebook de l'association.

Fabienne et moi y seront pour cet alléchant après-midi littéraire.

 

Denis

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10 janvier 2016 7 10 /01 /janvier /2016 17:08
Shoot : entretien avec Iza de Gisse

Suite à la lecture passionnante de Shoot 1 - L'autre (Editions La Bourdonnaye), j'ai proposé à Iza de Gisse de répondre à quelques-unes de mes questions et voici in extenso notre conversation via Internet :

– Qui est Iza de Gisse ?

Elle n’est rien de plus que ce qui est écrit en 4ème  de couverture. Polyvalente, elle passe son temps à se mettre en danger en explorant des horizons très éloignés de tout ce qu’elle connait. Soif d’apprendre, de comprendre, d’élargir le champ des possibles…

– Un premier roman ?

Oui, un premier roman abouti, pour lequel j’ai osé franchir le pas. Le pavé originel a été découpé en 4 volumes. Enfin, je n’ai pas divisé le nombre de pages par quatre ! Non, il m’a fallu restructurer chaque partie, et préserver un rythme continu. Tout est écrit et en attente d’être publié.

– Pourquoi avoir choisi un tel sujet  et un personnage de jeune drogué de 24 ans ? si loin semble-t-il de son auteure ?

Parce que j’aime les challenges ! J’aime les parcours difficiles où il faut se mouiller, se mettre en danger. J’aime apprendre, comprendre, réfléchir, me remettre en question. J’aime ce que la société délaisse et condamne… J’aime savoir pourquoi.

Pour moi, le pari était multiple :

. Je ne connaissais pas le monde de la drogue, à part à travers l’image que la société veut bien nous tailler.

. Mon héros est masculin, et m’a contrainte à me vêtir d’une peau et d’un cerveau d’homme. J’avais très peur de l’avis des lecteurs, peur d’être ridicule, mais paradoxalement, les lecteurs masculins préfèrent le livre, en général. Ça me surprend, et ça me touche énormément.

. Avant de plonger dans l’univers de Benjamin, par l’écriture, j’ai fait un long travail d’investigation, et ensuite, mon travail a été sans cesse supervisé, parce que je n’avais vraiment pas envie qu’on me prenne pour quelqu’un qui raconte sans savoir. Je n’avais pas envie de trahir ceux qui m’ont inspiré Benjamin.

Plonger dans ce milieu d’âmes et de cerveaux déchainés, brisés, enchainés à leur addiction n’a pas été de tout repos. Mais à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire, n’est-ce pas ?

Ensuite l’écriture m’a pris cinq ans. Le mot fin a été mis quand j’ai senti qu’il n’y avait plus de fausses notes, au bout d’une bonne quinzaine de jets, et j’en oublie, sûrement ! Je peux dire que le texte est de moi, l’éditeur n’a opéré aucune correction. Je ne pense pas que je pourrais un jour remettre un premier ou même deuxième jet de mon travail, et laisser quelqu’un prendre les commandes de mon histoire. C’est toute une symphonie, un soupir en plus ou en moins, et le morceau est par terre.

– On ne peut qu'aimer la littérature avec un tel style enveloppé, envoûtant ! Quels sont les auteurs qui ont pu hanter l'écriture de ce roman ?

Mes lectures sont très classiques. Quand j’écris, je lis peu, ou des trucs légers. Mon écriture est plutôt visuelle et musicale, car j’ai une formation de scénario et une vie professionnelle dans la musique. Je pars du principe que tout est rythme, musique. C’est le langage du corps et de l’esprit. L’instinct s’y reconnait, et s’y colle. Naturellement, quand on s’exprime, on suit un rythme, on marche en rythme, le coeur bat en rythme (c’est préférable !)

– Et la poésie aussi, on la sent sous entendue comme la musique des sons ? On imagine une bande sonore autour de ce roman ? poésie, musique…

Je suis étonnée et ravie que tu aies ressenti tout ça ! Mon écriture, mon style, c’est de la musique, oui, et la poésie sauve l’âme de la noyade. Quand j’écris, je suis entièrement prise dans mon histoire ; je ne le fais pas exprès, ça vient tout seul. Tour à tour dans la peau de chaque personnage, je dois plonger au plus profond de l’être, pour ne rien manquer des sentiments et ressentiments ; c’est un voyage difficile, périlleux, la poésie est alors comme un grand oiseau qui te cueille et t’emporte vers la lumière. Tout devient beau, vu du ciel.

– Une histoire, un ton et un style ? Tout cela est venu comment pour construire ce livre ?

Le ton, le style, c’est inné, me semble-t-il, je ne fais rien pour le trouver ou l’améliorer, c’est comme une respiration.

L’histoire, c’est autre chose, c’est de la technique. D’abord, je construis mes personnages. Je dois tout savoir d’eux, depuis leur naissance, car chaque détail va être déterminant pour leurs actes. Exactement comme dans la vraie vie. Or pour que la mayonnaise prenne, il faut des personnages réalistes, vivants, humains ! Ça prend du temps, il faut qu’ils soient cohérents sinon ils vont faire n’importe quoi et mon histoire ne sera pas crédible. Ensuite, ces gens-là vont se rencontrer, se croiser, nouer ou briser leur destin.

L’histoire est construite sur le principe de la dramaturgie, on n’a pas fait mieux pour capter l’attention du lecteur, et ensuite le maintenir en haleine. Ça s’apprend. Je ne crois pas qu’on puisse écrire un livre intéressant si on ne passe pas par la case apprentissage.

Pour Shoot, je propose un voyage en grand huit, un vrai tourbillon de sentiments, d’émotions, pour que le lecteur brise sa carapace et attrape le tempo de Benjamin ! J’ai voulu le choquer, le forcer, l’épuiser, lui faire sentir la vie qui court en lui et visiter ses coins obscurs, rencontrer son « dark passenger ». Les trois prochains vont crescendo… ah ah ah !

Je te remercie Denis pour ton écoute et ton attention. Nous avons claqué des doigts sur le même tempo, oui, Shoot est trempé dans le blues qui est la musique de la vie.

Je suis ébahie par tout ce que tu as ressenti en lisant Shoot. C’était bien sûr le but recherché, mais je n’ai jamais cessé de douter… Je te remercie donc de la joie que tu mets dans mon coeur… À très bientôt… et vraiment merci…

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Merci Iza de t'être prêtée à ce "jeu" qui n'est pas facile. Poser des questions n'est pasnon plus aisé car j'avais surtout envie de savoir comment un écrivain travaille un sujet tel celui-ci avec une telle intensité littéraire.

Encore bravo pour ce magnifique texte et on se donne rendez-vous pour le tome 2...

Denis

Et si le blues du livre était interprêté par B.B.King !!

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7 janvier 2016 4 07 /01 /janvier /2016 19:06
Chanter la poésie :

Un poète : Jean Genet (1910-1986)

Un poème : Le condamné à mort (1942)

Un chanteur(groupe) : Têtes Raides

 

 

A la mémoire
de Maurice PILORGE
assasin de vingt ans

Le vent qui roule un cœur sur le pavé des cours,
Un ange qui sanglotte accroché dans un arbre,
La colonne d’azur qu’entortille le marbre
Font ouvrir dans ma nuit des portes de secours.

Un pauvre oiseau qui tombe et le goût de la cendre,
Le souvenir d’un œil endormi sur le mur,
Et ce poing douloureux qui menace l’azur
Font au creux de ma main ton visage descendre.

Ce visage plus dur et plus léger qu’un masque,
Et plus lourd à ma main qu’aux doigts du réceleur
Le joyau qu’il convoite; il est noyé de pleurs.
Il est sombre et féroce, un bouquet vert le casque.

Ton visage est sévère: il est d’un pâtre grec.
Il reste frémissant aux creux de mes mains closes.
Ta bouche est d’une morte et tes yeux sont des roses,
Et ton nez d’un archange est peut-être le bec.

Le gel étincelant de ta pudeur méchante
Qui poudrait tes cheveux de clairs astres d’acier,
Qui couronnait ton front des pines du rosier
Quel haut-mal l’a fondu si ton visage chante?

Dis-moi quel malheur fou fait éclater ton œil
D’un désespoir si haut que la douleur farouche,
Affolée, en personne, orne ta ronde bouche
Malgré tes pleurs glacés, d’un sourire de deuil?

Ne chante pas ce soir les <>!
Gamin d’or sois plutôt princesse d’une tour
Rêvant mélancolique à notre pauvre amour;
Ou sois le mousse blond qui veille à la grand’hune.

Et descend vers le soir pour chanter sur le pont
Parmi les matelots à genoux et nus tête
L’ave maris stella. Chaque marin tient prête
Sa verge qui bondit dans sa main de fripon.

Et c’est pour t’emmancher, beau mousse d’aventure
Qu’ils bandent sous leur froc les matelots musclés.
Mon Amour, mon Amour, voleras-tu les clés
Qui m’ouvriront ce ciel où tremble la mature

D’où tu sèmes, royal, les blancs enchantements
Qui neigent sur mon page, en ma prison muette:
L’épouvante, les morts dans les fleurs de violette….
La mort avec ses coqs; Ses fantômes d’amants…

Sur ses pieds de velours passe un garde qui rôde.
Repose en mes yeux creux le souvenir de toi.
Il se peut qu’on s’évade en passant par le toit.
On dit que la Guyane est une terre chaude.

O la douceur du bagne impossible et lointain!
O le ciel de la Belle, ô la mer et les palmes,
Les matins transparents, les soirs fous, les nuits calmes,
O les cheveux tondus et les Peaux-de-Satin!

Rêvons ensemble, Amour, à quelque dur amant
Grand comme l’Univers mais le corps taché d’ombres
Qui nous bouclera nus dans ces auberges sombres,
Entre ses cuisses d’or, sur son ventre fumant,

Un mac éblouissant taillé dans un archange
Bandant sur les bouquets d’œillets et de jasmins
Que porteront tremblants tes lumineuses mains
Sur son auguste flanc que ton baiser dérange.

Tristesse dans ma bouche! Amertune gonflant
Gonflant mon pauuvre cœur! Mes amours parfumées
Adieu vont s’en aller! Adieu couilles aimées!
O sur ma voix coupée adieu chibre insolent!

Gamin ne chantez pas, posez votre air d’apache!
Soyez la jeune fille au pur cou radieux,
Ou si tu n’as de peur l’enfant mystérieux
Mort en moi bien avant que me tranche la hache.

Enfant d’honneur si beau couronné de lilas!
Penche-toi sur mon lit, laisse ma queue qui monte
Frapper ta joue dorée. Écoute il te raconte,
Ton amant l’assassin sa geste en mille éclats.

Il chante qu’il avait ton corps et ton visage,
Ton cœur que n’ouvriront jamais les éperons
D’un cavalier massif. Avoir tes genoux ronds!
Ton cou frais, ta main douce, ô môme avoir ton âge!

Voler voler ton ciel éclaboussé de sang
Et faire un seul chef d’œuvre avec les morts cueillies
Ça et là dans les prés, les haies, morts éblouies
De préparer sa mort, son ciel adolescent…

Les matins solennels, le rhum, la cigarette…
Les ombres du tabac, du bagne et des marins
Visitent ma cellule où me roule et m’étreint
Le spectre d’un tueur à la lourde braguette.

«

La chanson qui traverse un monde ténébreux
C’est le cri d’un marlou porté par la musique.
C’est le chant d’un pendu raidi comme une trique.
C’est l’appel enchanté d’un voleur amoureux.

Un dormeur de seize ans appelle de bouées
Que nul marin ne lance au dormeur affolé.
Un enfant reste droit contre le mur collé.
Un autre dort bouclé dans ses jambes noués.

«

J’ai tué pour les yeux bleus d’un bel indifférent
Qui jamais ne comprit mon amour contenue,
Dans sa gondole noire une amante inconnue,
Belle comme un navire et morte en m’adorant.

Toi quand tu seras prêt, en arme pour le crime,
Masqué de cruauté, casqué de cheveux blonds,
Sur la cadence folle et brève des violons
Égorge une rentière en amour pour ta frime.

Apparaîtra sur terre un chevalier de fer,
Impassible et cruel, visible malgré l’heure
Dans le geste imprécis d’une vieille qui pleure.
Ne tremble pas surtout, devant son regard clair.

Cette apparition vient du ciel redoutable
Des crimes de l’amour. Enfant des profondeurs
Il naîtra de son corps d’étonnantes splendeurs,
Du foutre parfumé de sa queue adorable.

Rocher de granit noir sur le tapis de laine
Une main sur sa hanche, écoute-le marcher.
Marche vers le soleil de son corps sans péché,
Et t’allonge tranquille au bord de sa fontaine.

Chaque fête du sang délègue un beau garçon
Pour soutenir l’enfant dans sa première épreuve.
Apaise ta frayeur et ton angoisse neuve,
Suce son membre dur comme on suce un glaçon.

Mordille tendrement le paf qui bat ta joue,
Baise sa tête enflée, enfonce dans ton cou
Le paquet de ma bite avalé d’un seul coup.
Ètrangle-toi d’amour, dégorge, et fais ta moue!

Adore à deux genoux, comme un poteau sacré
Mon torse tatoué, adore jusqu’aux larmes
Mon sexe qui te romp, te frappe mieux qu’une arme,
Adore mon bàton qui va te pénétrer.

Il bondit sur tes yeux; il enfile ton âme
Penches un peu la tête et le vois se dresser.
L’apercevant si noble et si propre à baiser
Tu t’inclines très bas en lui disant: « Madame »!

Madame écoutez-moi! Madame on meurt ici!
Le manoir est hanté! La prison vole et tremble!
Au secours, nous bougeons! Emportez-nous ensemble,
Dans votre chambre au Ciel, Dame de la merci!

Appelez le soleil, qu’il vienne et me console.
Étranglez tous ces coqs! Endormez le bourreau!
Le jour sourit mauvais derrière mon carreau.
La prison pour mourir est une fade école.

«

Sur mon cou sans armure et sans haine, mon cou
Que ma main plus légère et grave qu’une veuve
Effleure sous mon col, sans que ton cœur s’émeuve
Laisse tes dents poser leur sourire de loup.

O viens mon beau soleil, ô viens ma nuit d’Espagne
Arrive dans mes yeux qui seront morts demain.
Arrive, ouvre ma porte, apporte-moi ta main,
Mène-moi loin d’ici battre notre campagne.

Le ciel peut s’éveiller, les étoiles fleurir,
Et les fleurs soupirer, et des prés l’herbe noire
Accueillir la rosée où le matin va boire,
Le clocher peut sonner: moi seul je vais mourir.

O viens mon ciel de rose, O ma corbeille blonde!
Visite dans sa nuit ton condamné à mort.
Arrache-toi la chair, tue, escalade, mords,
Mais viens! Pose ta joue contre ma tête ronde.

Nous n’avions pas fini de nous parler d’amour.
Nous n’avions pas fini de fumer nos gitanes.
On peut se demander pourquoi les Cours condamnent
Un assassin si beau qu’il fait pâlir le jour.

Amour viens sur ma bouche! Amour ouvre les portes!
Traverse les couloirs, descends, marche léger,
Vole dans l’escalier, plus souple qu’un berger,
Plus soutenu par l’air qu’un vol de feuilles mortes.

O traverse les murs; s’il le faut marche au bord
Des toits, des océans; couvre-toi de lumière,
Use de la menace, use de la prière,
Mais viens, ô ma frégate une heure avant ma mort.

«

Les assassins du mur s’enveloppent d’aurore
Dans ma cellule ouverte au chant des hauts sapins,
Qui la berce, accrochée à des cordages fins
Noués par des marins que le clair matin dore.

Qui grava dans le plâtre une Rose des Vents?
Qui songe à ma maison, du fond de sa Hongrie?
Quel enfant s’est roulé sur ma paille pourrie
A l’instant du réveil d’amis se souvenant?

Divague ma Folie, enfante pour ma joie
Un consolant enfer peuplé de beaux soldats,
Nus jusqu’à la ceinture, et des frocs résédas
Tire d’étranges fleurs dont l’odeur me foudroie.

Arrache on ne sait d’où les gestes les plus fous.
Dérobe des enfants, invente des tortures,
Mutile la beauté, travaille les figures,
Et donne la Guyane aux gars, pour rendez-vous.

O mon vieux Maroni, ô Cayenne la douce!
Je vois les corps penchés de quinze à vingt fagots
Autour du mino blond qui fume les mégots
Crachés par les gardiens dans les fleurs et la mousse.

Un clop mouillé suffit à nous désoler tous.
Dressé seul au dessus des rigides fougères
Le plus jeune est posé sur ses hanches légères
Immobile, attendant d’être sacré l’époux.

Et les vieux assassins se pressant pour le rite
Accroupis dan le soir tirent d’un bâton sec
Un peu de feu que vole, actif, le petit mec
Plus élégant et pur qu’une émouvante bite.

Le bandit le plus dur, dans ses muscles polis
Se courbe de respect devant ce gamin frêle.
Monte la lune au ciel. S’apaise une querelle.
Bougent du drapeau noir les mystérieux plis.

T’enveloppent si fin, tes gestes de dentelle!
Une épaule appuyée au palmier rougissant
Tu fumes. La fumée en ta gorge descend
Tandis que les bagnards, en danse solennelle,

Graves, silencieux, à tour de rôle, enfant,
Vont prendre sur ta bouche une goutte embaumée,
Une goutte, pas deux, de la ronde fumée
Que leur coule ta langue. O frangin triomphant,

Divinité terrible, invisible et méchante,
Tu restes impassible, aigu, de clair métal,
Attentif à toi seul, distributeur fatal
Enlevé sur le fil de ton hamac qui chante.

Ton âme délicate est par de là les monts
Accompagnant encor la fuite ensorcelée
D’un évadé du bagne, au fond d’une vallée
Mort, sans penser à toi, d’une balle aux poumons.

Élève-toi dans l’air de la lune ô ma gosse.
Viens couler dans ma bouche un peu du sperme lourd
Qui roûle de ta gorge à tes dents, mon Amour,
Pour féconder enfin nos adorables noces.

Colle ton corps ravi contre le mien qui meurt
D’enculer la plus tendre et douce des fripouilles.
En soupesant charmé tes rondes, blondes couilles,
Mon vit de marbre noir t’enfile jusqu’au cœur.

Oh vise-le dresé dans son couchant qui brûle
Et va me consumer! J’en ai pour peu de temps,
Si vous l’osez, venez, sortez de vos étangs,
Vos marais, votre boue où vous faites des bulles

Ames de mes tués! Tuez-moi! Brûlez-moi!
Michel-Ange exténué, j’ai taillé dans la vie
Mais la beauté Seigneur, toujours je l’ai servie,
Mon ventre, mes genoux, mes mains roses d’émoi.

Les coqs du poulailler, l’alouette gauloise,
Les boîtes du laitier, une cloche dans l’air,
Un pas sur le gravier, mon carreau blanc et clair,
C’est le luisant joyeux sur la prison d’ardoise.

Messieurs je n’ai pas peur! Si ma tête roulait
Dans le son du panier avec ta tête blanche,
La mienne par bonheur sur ta gracile hanche
Ou pour plus de beauté, sur ton cou mon poulet….

Attention! Roi tragique à la bouche entr’ouverte
J’accède à tes jardins de sable, désolés,
Où tu bandes, figé, seul, et deux doigts levés,
D’un voile de lin bleu ta tête recouverte.

Par mon délire idiot je vois ton double pur!
Amour! Chanson! Ma reine! Est-ce ton spectre mâle
Entrevu lors des jeux dans ta prunelle pâle
Qui m’examine ainsi sur le plâtre du mur?

Ne sois pas rigoureux, laisse chanter matine
A ton cœur bohémien; m’accorde un seul baiser…
Mon Dieu je vais claquer sans te pouvoir presser
Dans ma vie une fois sur mon cœur et ma pine!

«

Pardonnez-moi mon Dieu parce que j’ai péché!
Les larmes de ma voix, ma fièvre, ma souffrance,
Le mal de m’envoler du beau pays de France,
N’est-ce pas assez monseigneur pour aller me coucher
Trébuchant d’espérance.

Dans vos bras embaumés, dans vos châteaux de neige!
Seigneur des lieux obcurs, je sais encore prier.
C’est moi mon père, un jour, qui me suis écrié:
Gloire au plus haut du ciel, au dieu qui me protège
Hermès au tendre piéd!

Je demande à la mort la paix, les longs sommeils,
Les chants des Séraphins, leurs parfums, leurs guirlandes,
Les angelots de laine en chaudes houppelandes,
Et j’espère des nuits sans lunes ni soleils
Sur d’immobiles landes.

Ce n’est pas ce matin que l’on me guillottine.
Je peux dormir tranquille. A l’étage au dessus
Mon mignon paresseux, ma perle, mon jésus,
S’éveille. Il va cogner de sa dure bottine
A mon crane tondu.

«

Il paraît qu’à côté vit un épilectique.
La prison dort debout au noir d’un chant des morts.
Si des marins sur l’eau voient s’avancer les ports
Mes dormeurs vont s’enfuir vers une autre Amérique.

«

J’ai dédié ce poème à la mémoire de mon ami Maurice Pilorge dont le corps et le visage radieux hantent mes nuits sans sommeil. En esprit je revis avec lui les quarante derniers jours qu’il passa, les chaînes aux pieds et parfois aux poignets, dans la cellule des condamnés à mort de la prison de Saint-Brieux. Les journaux manquent d’à propos. Ils commirent d’imbéciles articles ponr illustrer sa mort qui coïncidait avec l’entrée en fonction du bourreau Desfourneaux. Commentant l’attitude de Maurice devant la Mort le journal l’Œuvre dit <>. Bref on le ravala. Pour moi, qui l’ai connu et qui l’ai aimé, je veux ici, le plus doucement possible, tendrement, affirmer qu’il fut digne, par la double et unique splendeur de son âme et de son corps, d’avoir le bénifice d’une telle mort. Chaque matin, quand j’allais, grâce à la complicité d’un gardien ensorcelé, par sa beauté, sa jeunesse et son agonie d’Appollon, de ma cellule à la sienne pour lui porter quelques cigarettes, levé tôt il fredonnait et me saluait ainsi, en souriant: <> Originaire du Puy de Dôme il avait un peu l’accent d’Auvergne. Les jurés, offensés par tant de grâce, stupides mais pourtant prestigieux dans leur rôle de Parques le condamnèrent à 20 ans de travaux forcés pour cambriolage de villas sur la côte, et le lendemain, parce qu’il avait tué son amant Escudero pour lui voler moins de mille francs, cette même Cour d’assises condamnait mon ami Maurice Pilorge à avoir la tête tranchée. Il fut exécuté le 17 mars 1939 à Saint-Brieux.

 

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3 janvier 2016 7 03 /01 /janvier /2016 20:40
Shoot : 1 - L'autre d'Iza de Gisse (La Bourdonnaye)

Shoot : 1 - L'autre d'Iza de Gisse

(La Bourdonnaye - Août 2015 - 333 pages)

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Lire un livre reçu en S.P. est souvent synonyme de piège : avons-nous le droit de dire la vérité, toute la vérité ?  Oui, oui et oui.

Et j'ai osé prévenir l'auteure : j'ai vraiment aimé son roman et son style.

Merci à Loley de m'avoir mis en contact avec Iza de Gisse pour découvrir son livre.

D'entrée, je peux dire que je n'ai jamais touché à la drogue d'une manière ou d'une autre. Je suis un "sage homme" ! Alors, plonger dans l'univers de Benjamin dit "papi", jeune homme toxicomane et vendeur de drogue était une aventure originale pour moi.

Nous sommes en 1994.

Benjamin dit papi vient de voler de l'alcool dans un supermarché et s'enfuit en voiture avec son complice Kevin. Depuis cinq ans il n'avait plus rien fait avec ce "fou" mais comme il doit de l'argent à. Bruno il n'avait pas le choix. Ils se sont bien shootés avant le vol pour se sentir plus à l'aise et moins conscients des risques.

Bruno est photoreporter mais aussi dealer. Papi va chercher la drogue à Rotterdam et la vend à ses amis. Papi se rend compte qu'il se tue à consommer toute cette drogue et il pense aussi à sa mère chez qui il vit et à qui il fait endurer ses comportements de camé.

Papi est allé en prison à cause de Kevin mais il ne lui en veut plus. Et là dans la voiture de la fuite il ne sait plus où il est entre rêve et réalité. La cavale continue à pied car il n'y a plus d'essence dans la voiture. Kevin a braqué un barman entretemps et papi ne comprend rien à tout cela. Il n'est pas lucide et poursuivi ll se cache dans un trou plein d'immondices.

Il ressort du chantier et marche dignement dans Paname. Il a trouvé une bouteille de vin et en boit quelques gorgées quand il tombe sur une patrouille de flics. Il ne dit rien mais se retrouve au"36" où là on trouve de la came sur lui. C'en est fini de ses rêves!

C'est Pujol qui l'interroge, un flic qui se veut compréhensif d'autant qu'un de ses flics s' est suicidé la semaine dernière et il lui disait qu'il fallait aider les toxicomanes.

Le soir il est conduit en prison en attendant sa comparution devant le juge. L'endroit est insalubre et surchargé en détenus. Là aussi on vit l'humiliation de la promiscuité et de l'absence de toute hygiène sans oublier qu'il a fallu passer par la fouille humiliante.

Il passe devant le tribunal et écope de trois mois de prison avec sursis.

Il deale à nouveau près du centre commercial. Mais sa mère lui a dit qu'elle venait de prendre sa retraite par anticipation et cela change tout pour lui. Finie sa liberté de faire venir qui il veut dans la journée et de recevoir des appels téléphoniques. Il va devoir réorganiser sa vie.

Une vie déjà tellement gâchée par son addiction à la drogue. Mais en sortir est tellement difficile. Bruno est son gourou et Benjamin a une rénération pour lui. Kevin est un ami qu'il a envie de fuir régulièrement. Quant à sa mère, elle a sans doute tout compris de sa vie mais elle reste passive devant la vie de son fils.

Shoot est cette vision intérieure de l'esprit d'un drogué. Il écrit avec lucidité cet état de fait. On se laisse entraîné avec lui, dans ses confusions de temps et de lieux. On croit à son histoire et on oublie que la fiction de ses hallucinations vient perturber le récit. Mais justement la force du roman est là, de nous "hypnotiser" en tant que lecteur. On court à ses côtés et bien sûr on voudrait l'aider à sortir de tout cela.

L'autre, c'est la voix qui est en lui et qui lui dit ce qu'il devrait faire, sentir. Ses propos sont en italique tout au long du livre. Car il y a une voix intérieure très puissante qui contrebalance les instincts du moment de Benjamin. Un voix de la conscience pour cet être toujours entre deux "eaux".

Benjamin est lui-même le narrateur de son roman. Il a pris la distance du temps car il écrit son histoire dans les temps du passé.

Extrait page 60 : "Je progressais dans une espèce de transe de peur et de dégoût. Mes pieds tâtonnaient le sol à chaque pas, mes mains raclaient une paroi hasardeuse. Toute la came que je m'étais collée dans la soirée bouillait dans mes veines. L'odeur de charogne me donnait des haut-le-coeur. Je vomissais de la bile toutes les trois secondes... Je me sentais à la fois mou et survolté... J'étais en nage".

Comme il s'agit d'un titre 1 - L'autre, on attend avec impatience la suite car la fin du livre nous laisse augurer qu'il va se passer quelque chose d'inattendu au bout du voyage...

Un livre que je recommande très sincèrement car il a du corps et du caractère.

Encore merci à l'auteure, à l'éditeur et à Loley.

Denis

 

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30 décembre 2015 3 30 /12 /décembre /2015 21:15
Le poinçonneur Hines de James Kelman (Métailié)

Le poinçonneur Hines de James Kelman

(Métailié - Bibliothèque écossaise - 270 pages - Septembre 1999)

Traduit de l'anglais (Écosse) par Céline Schwaller

Titre original : The busconductor Hines (1984)

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James Kelman est né en 1946 à Glasgow. 4 de ses romans ont été publiés dans la collection Bibliothèque écossaise des éditions Métailié. N'hésitez pas à vous précipiter dans votre chère librairie ou bibliothèque pour lire cet auteur.

Après avoir lu dans la même collection "Les empreintes du diables" de John Burnside, voici une deuxième lecture tout autant jubilatoire.

L'ambiance, l'atmosphère n'ont rien à voir entre les deux romans mais l'art de la narration, le style original et bien construit rapprochent les deux livres pour en faire de véritables plaisirs de lecture.

James Kelman joue beaucoup sur la répétition, à l'image de la vie de son personnage Robert, dit Rab Hines. Marié à Sandra et père d'un jeune enfant de 4 ans et demi, Paul, il pourra avoir une vie de routine sans gros soucis et pourtant... Hines est un "insoumis", un être qui met la liberté au-dessus de tout au point de faire prendre de grands risques à sa vie familiale.

Rab Hines est poinçonneur en grève au début du roman puis en retard pour prendre son poste. De son côté Sandra son épouse voudrait prendre un temps plein pour améliorer le quotidien obligeant seulement à mettre Paul à la crèche toute la journée.

Hines est un grand fumeur et il est très amoureux de sa femme Sandra. Côté boulot c'est plus compliqué. Il est souvent réprimé par un inspecteur pour fautes pendant son service et c'est déjà la troisième et sans doute dernière fois qu'il est repêché par la compagnie de bus.

Même si Reilly est un ami de longue date, il y a toujours une rivalité entre chauffeurs et poinçonneurs, dans cette compagnie de bus de Glasgow. On est au début des années 1980 a priori et le métier de poinçonneur commence à être mis en péril. Mais de par ses négligences et son manque de sérieux, Hines n'a aucune chance de devenir chauffeur.

Quant au logement il est de plus en plus insalubre. Et Hines s'angoisse car ce soir sans prévenir Sandra n'est pas encore rentrée.

Quand elle rentre Hines parle de séparation et elle ne comprend pas car elle est juste allée au pub avec ses collègues de travail.

Il n'a pas envie de travailler aujourd'hui alors il se fait porter pâle et se rend chez ses parents où il ne voit que sa mère puis il va à la bibliothèque et au pub avant de rentrer chez lui. Il sent Sandra contrariée ces temps-ci. Elle ne rit plus.

Elle voit aussi ses parents mais le soir ils se retrouvent plus amoureux qu'avant et avec encore plus de projets.

Quand il vient chercher sa paie Hines apprend qu'il est convoqué à la direction l'après-midi. Or il refuse d'y aller en dehors de ses heures de travail. Il en parle à Sammy le délégué syndical prêt à le soutenir par une grève si on le licencie pour refus d'aller à cette convocation.

 

On s'immerge dans la vie et les idées de Hines, ce drôle d'homme qui oublie de se réveiller le matin, qui entend faire valoir ses droits. Alternance de scènse de la vie conjugale et de scènes de la vie professionnelle, avec de longs moments de dialogue intérieur où on lit les idées de Hines au fil de ses tours et détours, stoppant certaines phrases pour repartir sur une autre pensée.

Page 166 : "En rentrant de la crèche, Hines prétendit qu'ils étaient poursuivis par  des créatures monstrueuses, et Paul adora ça. Ensuite, il le fit participer au ménage et au rangement avant de préparer la bouffe, et quand Sandra arriva, tout allait bien. Il parla nochalamment de généralités, mais elle était silencieuse. Elle était assez fatiguée, à l'évidence surprise de trouver la maison comme ça, heureuse de voir que le repas était prêt. Il ne lui dit pas qu'il n'était pas allé travailler, mais comme elle ne s'intéressait pas trop à la conversation, il n'eut pas à s'étendre sur le sujet".

Sortir de la banalité de la vie au moins par la pensée et les projets est le thème récurrent du roman. On ne se lasse jamais de lire les aventures du poinçonneur tellement on est emporté par le ton du roman.

Un très grand roman d'une grande originalité qui ravira les amateurs de littérature où le style, le fil narratif sont plus importants que les faits pour aborder une vie ordinaire en spectateur averti.

Bonne lecture,

Denis

Livre lu dans le cadre du mois kiltissime animé par Cryssilda Collins.

Le poinçonneur Hines de James Kelman (Métailié)
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27 décembre 2015 7 27 /12 /décembre /2015 17:42
Profession du père de Sorj Chalandon (Grasset)

Profession du père de Sorj Chalandon

(Grasset - 316 pages - Août 2015)

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"Profession du père" est le septième roman de Sorj Chalandon, né en 1952, journaliste devenu écrivain en 2005 et régulièrement primé. Dans ce roman, il se vieillit de trois ans pour naître en 1949 et raconter sa jeunesse auprès de cet étrange père.

 

André Choulans, le père, est incinéré le 23 avril 2011 en présence de sa veuve et de son fils Émile. 50 ans avant jour pour jour avait lieu le putsch d'Alger que le père encensait, farouche adversaire du Général de Gaulle.

Salan, un héros pour le père. Il impose à Émile d'écrire à la craie sur les murs des rues ce nom. Et quand le putsch est terminé Émile doit écrire OAS. Et le père parle de Ted un ami américain rencontré à la base militaire de Châteauroux et qui va revenir en France. André peut enfin dire tout ces "secrets" à son fils qui est pour lui un homme à présent qu'il a douze ans.

Quelle profession du père à mettre sur les papiers de l'école? Agent secret ou encore mieux "sans". Émile doit aussi être un soldat de la clandestinité. Alors son père veut en faire un sportif et un agent secret comme lui.

Il lui invente un dimanche une mission : aller porter un message secret à Salan caché chez Ted pour qu'Emile apprenne ainsi à se cacher, surveiller et espionner.

Et puis le père fait aussi croire qu'il est en contact par écrit avec de Gaulle depuis plusieurs années. D'ailleurs il a mis en gage chez son ami garagiste une lettre du général.

Le père se montre souvent violent avec son fils. Il lui raconte une nouvelle histoire. Lui et Ted doivent cacher un danseur russe qui ne veut pas rentrer en URSS.

Et bien sûr le père et Ted ont été impliqués dans l'attentat du Petit Clamart.

La guerre d'Algérie est terminée et Luca Biglioni est rentré d'Algérie avec ses parents, chassés du pays. Arrivé dans sa classe, Émile veut en faire un adepte de l'OAS.

Et Émile éduque Luca à la manière de son père. La prochaine mission est l'assassinat de de Gaulle le 1er janvier 1963. Et ce sera Luca qui le tuera. Sa récompense sera d'épouser la fille du chef de l'OAS. Luca semble tout gober. Quant à Émile ses mauvaises notes le prive de Noël et est sévèrement sanctionné.

Luca a suivi toutes les instructions d' Émile y compris couper les fils électriques de chez lui et fuir avec l'argent et les papiers de ses parents. Il s' est présenté à la porte des parents d'Émile compliquant encore plus les choses. Et puis il a fugué, retrouvé deux jours plus tard et mis en pension. L'enquête au lycée n'a rien donné sur un éventuel complice.

Émile est venu en tenue d'agent secret avec le pistolet de son père ce qui a fait scandale à l'école.

Emile passe un encéphalogramme pour être sûr qu'il n'est pas fou mais c'est son père qui semble fou à la fin de sa vie.

 

 

Un père mégalomane, violent, égocentrique, solitaire, mystérieux et une mère soumise au père, sans envergure au point d'abandonner l'éducation "militaire" de son fils à son mari.

Un fils qui se vange sur un ami de classe en faisant de Luca un nouveau "bouc-émissaire".

Emile a-t-il été heureux malgré tout ? Après une enfance difficile puis une vie d'adulte loin de parents isolés qui refusent de s'intéresser à la vie de leur fils.

Le livre débute et se termine sur l'inhumation du père, comme une boucle bouclée.

Le style du livre est à l'image de cette éducation martiale. Phrases courtes qui claquent comme les sentances et agissements d'André Choulans.

 

Exemple page 89 : "J'ai été privé de dîner. Il a allumé la radio. Chaque soir, la voix du transistor m'aidait à m'endormir. La vaisselle, l'eau, les chaises raclées sur le sol, le pas des parents, une rumeur qui disait la fin du jour. // Personne n'est venu me voir. Ma jambe me faisait mal. Je grelottais. Petits mouvements de mâchoire. J'avalais ma salive pour soulager mon oreille. Pas un bruit dans l'appartement, pas un mot. Rien? Ni sa voix à lui, ni sa voix à elle. J'ai attendu longtemps que quelqu'un parle de nouveau. Le sommeil m'a surpris comme ça, les yeux ouverts".

Un livre fort, émouvant, dérangeant aussi car on a du mal à accepter toutes ces brimades envers Emile et envers Luca.

A lire absolument,

Denis

 

 

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