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Tangente vers l'est de Maylis de Kerangal
(Verticales - collection "minimales" - 128 pages - janvier 2012)
Nouveau roman de Maylis de Kerangal lu comme toujours avec beaucoup de plaisir.
Le précédent que j'ai présenté est "Dans les rapides" qui se passait au havre dans les années 1970.
Cette fois, l'action se passe dans le transsibérien.
Dans le cadre de l'année France-Russie en 2010, CulturesFrance et France Culture ont permis à 20 auteurs d’effectuer un voyage d’écrivain à bord du transsibérien de Moscou à Vladivostok. C’est de ce voyage qu’est né « Tangente vers l’Est« .
Pour une fiction de France Culture Maylis de Kerangal a préféré le roman au récit de voyage.
Ainsi, des militaires installés dans ce train lui ont inspiré cette 'intrigue" littéraire.
Aliocha, un jeune appelé russe monte dans le transsibérien pour rejoindre son régiment. Il est encadré par des gradés qui veillent sur le bon déroulement du trajet.
Hélène, une française qui semble avoir fui son fiancé, fait également le voyage dans ce train mythique. Elle se retrouve dans le même compartiment qu'Aliocha, plutôt gênée par cette promiscuité qui doit durer plusieurs jours. Elle se montre donc très distante.
Très vite, elle comprend qu'il a l'intention de déserter, alors, elle décide de l'aider à se cacher et à échapper aux contrôles des officiers...
Comme toujours chez cette auteure que j'apprécie vraiment beaucoup et de plus en plus dirais-je, à mesure que je découvre son oeuvre, le style est limpide, clair et toujours "vrai", bien construit.
On se laisse porter par son écriture et ses intrigues qui savent nous captiver.
Page 39 : (C'est le moment de la rencontre entre Aliocha et Hélène) : "Les portes s'ouvrent dans son dos. Quelqu'un s'est introduit dans le compartiment. Aliocha se retourne : la femme qui est montrée à Krasnoïarsk, l'étrangère, c'est elle. Dans une main, elle tient un verre pris dans une résille de métal argenté, dans l'autre une cigarette allumée. Elle se place de profil le long d'une ouverture latérale, elle aussi fouille la nuit qui n'est jamais absolument close ici, mais ambiguë, chargée d'une luminosité électrique qui fait toujours croire que le jour va poindre d'un instant à l'autre. Aliocha l'observe en douce, pivote ses yeux dans ses orbites sans bouger le torse : elle fume, très calme, le visage vaguement luisant."
On voit ici la qualité de l'observation, des "regards". Il y a une réelle atmosphère dans ce livre : observation, sentiments refoulés, désir d'évasion et d'introspection. Mais aussi ces regards se parlent car lui parle russe et elle française... Et le moyen de communiquer c'est deviner ce que pense l'autre... Jeux de miroir...
Voilà, ce texte de 130 pages est un beau moment de lecture...
Bonne lecture,
Denis