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Liberté pour les ours de John Irving (Le Seuil - 411 pages - mai 1991)
Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Josée Kamoun
Titre original : Setting free the Bears - 1968
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Premier roman de John Irving publié en 1968 alors que l'auteur a 26 ans (né en 1942 à Exeter au New Hampshire). Il ne sera donc proposé aux lecteurs français que 23 ans plus tard, quand l'auteur aura connu la notoriété. C'est en effet le 6e roman publié, alors.
C'est dire qu'il n'a pas eu de diffusion rapide et donc qu'il devait être "anecdotique" dans l'oeuvre de John Irving. Sauf qu'un premier roman est toujours à regarder avec beaucoup d'attention.
On peut ainsi dire que la première phrase qui a débuté l'oeuvre littéraire de John Irving est la suivante : "Je savais le trouver tous les midis, assis sur un banc dans le parc de l'Hôtel de Ville, un petit sachet bourré de radis de serre sur les genoux et une bouteille de bière à la main".
Et des milliers de pages ont suivi cet instant...
Pour l'heure, intéressons-nous aux 400 premières pages données par John Irving sous le titre "Setting free the Bears". La liberté est déjà au rendez-vous ainsi que l'ours qui va apparaitre dans nombre de romans de l'auteur.
Deux personnages que l'on peut dire "loufoques", au risque de faire fuir les lecteurs cartésiens (rassurez-vous je me sens très cartésien et j'adore l'oeuvre de Irving) : Siegfried Javotnik, dit Siggy et Hannes Graff.
Trois parties inégales en longueur, bien que la deuxième partie aurait pu être divisée eu deux : 1 - Siggy (un peu plus de 110 pages, racontée par Graff) ; 2 - Les carnets (environ 190 pages racontée par Siggy) ; 3 - Liberté (environ 100 pages racontée par Graff).
Et de cours chapitres non numérotés. Mais tout est daté avec précision dans le roman.
Voici pour la structure du texte, plutôt "symétrique".
La première partie raconte la rencontre de Siggy et Graff autour d'une vielle moto. Les deux hommes avides de voyage et de liberté décident de partir en voyage ensemble avec cette moto. Ils vont rencontrer deux jeunes filles, vont au zoo de Vienne, (ville qu'ils habitent) et partent tous deux sur les routes, avec pour fil conducteur la rivière Ybbs. Quelques péripéties parsèment leur parcours. Et puis, ils rencontent une jeune lingère, Gatten et Graff tombe immédiatement amoureux de la frêle jeune fille. Ils décident donc de rester auprès d'elle. Graff travaille alors pour un apiculteur et Siggy décide de partir pour le zoo de Vienne avec la folle envie de libérer les animaux. A son retour non désiré par les habitants du village, il a un accident avec la charrette qui contenait les ruches, lesquelles s'ouvrent, piquant tous ceux qui se trouvent au côté des ruches dont Graff et Siggy.
Commence alors la deuxième partie, qui contient les carnets de Siggy. Il y raconte sa "préhistoire", reprenant alors l'histoire de sa mère, autrichienne, puis cette de son père yougoslave. S'entrecroisent les notes prises par Siggy lors de sa nuit du 5 au 6 juin 1967 passée au zoo de Vienne dans le but de libérer les animaux.
Graff qui se remet de ses piqûres d'abeilles lit ces carnets et c'est lui qui a l'idée se mélanger les deux carnets. Ce qui est passionnant dans la présentation des parents de Siggy, c'est qu'il intègre l'histoire de ses parents dans le contexte historique de l'époque : celle de l'anschluss en février - mars 1938 (annexion de l'Autriche par l'Allemagne avec démission de Schuschnigg) pour sa mère et les années 1941 et suivantes avec l'entrée des nazis en Yougoslavie et l'émergence timide mais certaine d'un certain Josip Broz dit Tito.
Enfin, la troisième partie est difficile à résumer car elle est l'aboutissement du roman et c'est dommage d'effleurer la fin du livre. Je poserai simplement la question suivante : Siggy et Graff vont-ils réellement libérer les ours et plus encore les animaux du zoo?
Il convient ici de rappeler que John Irving, grâce à une bourse d'étude est venu à Vienne pendant une année et les lieux qu'il a connus comme Kaprun, village de montagne où il allait skier.
Vous aurez compris combien ce roman est riche, étonnant aussi, avec ces ruptures de styles, de rythme. Il faut se laisser porter par les mots, les fantasmes des personnages (donc de l'auteur) en se disant qu'une telle oeuvre est unique, inimitable dans l'univers littéraire du 20e siècle.
Et on prend un réel plaisir à se laisser guider par ces deux "fous" de liberté et de voyage. Ce que l'on aime être tout de même quand on lit et que l'on veut qu'un livre nous porte loin du réel. Irving est un magicien en ce sens et que de trouvailles de style, de narration. Un régal qui ne demande qu'à se laisser porter de livre en livre.
Alors, ma prochaine lecture, sera pour le "mois américain (USA)" organisé en octobre sur les blogs, avec son deuxième roman publié aux USA : "L'épopée du buveur d'eau" publié en 1972 aux USA et en 1988 (donc avant "liberté pour les ours" en France), avec le titre original : "The Water-method Man".
"Liberté pour les ours" a fait l'objet d'une lecture commune. Voici le lien vers l'article de Heide et de Valentyne (l'écho des écuries)
Et j'inscris également cette lecture dans le "challenge John Irving" initié par Val aime les livres
Note : 4/5 (la perfection n'existant pas)
Bonne lecture
Denis