BLOC D'UN COUPLE PASSIONNE DE LIVRES, ART , HISTOIRE, LITTERATURE ET COLLECTIONNEURS DE MARQUE-PAGES.
Les frères Karamazov de Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski (Omnibus)
Présenté et traduit du russe par Kyra Sanine
----------------------
Il fallait choisir une version et une traduction pour ce monument de la littérature mondiale et j'ai pris celle-ci car c'était celle qui était disponible à la bibliothèque. Il faut juste rappeler que André Markowicz a révolutionné la version française dans sa traduction pour Actes Sud.
Alors, c'est une vraie gageure de résumer en quelques phrases un texte de plus de 800 pages "serrées" dans la version Omnibus.
Très simplement, on pourrait dire qu'il y a un père : Fiodor Pavlovitch Karamazov, très peu sympathique voire complètement antipathique, très mauvais père, cupide... Et trois frères légitimes et un quatrième né d'une femme devenue folle et que Fiodor a confié à ses domestiques pour l'élever.
Trois frères donc : Dmitri (diminutif Mitia), l'aîné, en querelle avec son père pour l'héritage de sa mère que Fiodor a gardé pour lui seul. Et un montant de trois mille roubles aura toute sa "valeur" dans la suite du roman. Cet héritage sera une des clés du "parricide" dont il va être soupçonné plus tard; Ivan, tout comme Aliocha, est né d'une autre mère. Il est beaucoup plus raisonné que Dmitri et est progressiste, athée. Le plus jeune de ces frères "officiels" est Aliocha, très ancré dans la religion au point de vivre dans un monastère près du starets Zosime, sa "conscience", son "mentor".
Et le "batard" s'appelle Smerdiakov. Il est plutôt "voyou" et n'est guère aimé des trois frères. Le père s'en sert comme "domestiqu" et "homme à tout faire".
N'oublions pas quelques femmes qui ont toute leur importance dans ce "rapport de force" entre les Karamazov. Grouchenka est la maîtresse de Fiodor et de Dmitri, autrefois promise à un polonais qu'elle va retrouver pour le plus grand désarroi des Karamazov. Elle oscille entre l'un et l'autre et surtout se joue d'eux. Katarina Ivanovna est amoureuse de Dmitri mais elle n'est pas indifférente à Ivan qui lui montre de l'amour. Mme Khoklakhov et sa fille Lise ont un rôle moins important, sauf pour Aliocha car Lise lui dit l'aimer et il lui promet le mariage.
Tous les personnages principaux sont en scène. Zosime essaie de réconcilier la famille mais n'y parvient pas. Sa mort va troubler la ville entière et Aliocha en premier, d'autant que le statets lui a demandé de quitter le monastère après sa mort pour "vivre" une vie d'homme.
Le livre se tient sur une courte période et approfondit tous les dialogues, toutes les rencontres. Presque tous les dialogues sont "décalés", car on croit que les personnages vont aller dans un sens et ils vont dans une autre direction qui crée des tensions, des violences de paroles rudes, graves, qui laissent le lecteur amer. Là où l'on croit qu'une réconciliation pourra intervenir, le contraire se passe.
La folie, les délires, les pertes de conscience... sont présents constamment. Ivan a une fièvre qui le rend "fou" par exemple. Katerina a des crises également... Et puis, il y a le parricide, car c'est le thème central du livre. Dmitri est le coupable désigné, surtout qu'il a écrit une lettre en ce sens. Lors du procès et jusqu'au verdict, il va clamer son innocence. Smerdiakov pourrait être le meurtrier...
Parle-t-on encore de suspens aujourd'hui, car les classiques de la littérature n'ont généralement plus de secrets pour personne... Mais bon, j'y crois encore et toujours à l'innocence de Dmitri...
Albert Camus qui a adapté le roman au théâtre en 1938 préférait Ivan Karazamov aux autres personnages. C'est le personnage le plus "effacé" du roman. Autant honnête que Aliocha mais plus "discret", du moins c'est mon ressenti.
Ce chef d'oeuvre a inspiré nombre d'écrivains et de penseurs, dont Siegmund Freud (écrivant un article "Dostoïevski et le parricide"), Franz Kafka (touché par la haine vouée par les fils envers le père, qui le méritait bien compte tenu qu'il a "abandonné ses enfants pendant plusieurs années).
L'assassinat du père de l'écrivain par ses serfs serait pour quelque chose dans la genèse de ce livre.
Ce livre est d'une richesse absolue. D'une intelligence littéraire exceptionnelle, avec des digressions, des pensées profondes sur la religion, la politique et la littérature. Pouchkine est régulièrement cité.
Il faut de très longues heures de lecture, mais quel roman, quelle épopée russe...
J'ai lu ce livre dans le cadre d'une lecture commune initiée par "le blog des livres qui rêvent" (qui n'a pas encore publié son article) et "métaphore" (qui a abandonné sa lecture). Valentyne y a participé et a publié un superbe résumé. De même pour Ingannmic (Book'ing) et Nathalie.
Bonne lecture, (c'était une relecture pour moi 40 ans après une première lecture "adolescente")
Denis