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Correspondance Verhaeren - Zweig
(Editions Labor - Collection "Archives du futur" - 608 pages - 1996)
Edition établie par Fabrice Van de Kerckhove
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277 lettres échangées entre 1900 et 1914 par Emile Verhaeren (1855-1916) et Stefan Zweig (1881-1942) avec quelques lettres écrites par ou pour Marthe Verhaeren, l'épouse d'Emile.
Au moment où débute cette correspondance, en 1900, Verhaeren a 45 ans et commence à être vraiment reconnu en Belgique comme un grand poète. Zweig, lui, a 19 ans et a publié plus de 100 poèmes dans des revues. Il s'intéresse alors à Verhaeren qu'il va ensuite traduire, éditer dans le monde germanique (Allemagne et Autriche).
C'est ainsi l'objet de la première lettre de Zweig en 1900. Mais c'est surtout à partir de 1904 que leur correspondance s'étoffe. Ils vont se rencontrer régulièrement en Belgique chez Verhaeren au Caillou-qui-bique près de Roisin à Bruxelles ; en France à Saint Cloud ou à Paris. Egalement en Allemagne et en Autriche quand Zweig organise des conférences pour son ami poète.
La majeure partie de la correspondance est orientée sur le travail fait par Zweig pour diffuser l'oeuvre de Verhaeren dans son pays.
Le texte est très (trop !!!) riche en notes et informations autour des relations entre les deux hommes et le contexte politique et littéraire dans lequel se placent leurs lettres.
Rien que l'introduction fait 100 pages. C'est fastidieux par moments mais tellement éclairant sur cette période 1900 - 1914.
Pour les lettres belges, Camille Lemonnier est le "patriarche", très respecté. Et puis il y a Maeterlinck qui va, involontaire être le rival de Verhaeren pour le prix Nobel. Car même si ce prix est encore jeune, il est déjà très prisé compte tenu de sa renommée internationale.
Très belle amitié, fraternelle. Malheureusement, la Grande Guerre arrive. C'est l'invasion de la Belgique par l'armée allemande, ce que ne supporte pas Verhaeren, témoin d'atrocités, notamment sur des enfants.
Il en rendra compte dans ses poèmes. Zweig en a connaissance et ne comprend pas que Verhaeren puisse avoir la haine d'une culture qu'il a tant vénérée pour quelques atrocités commises par des soldats. Ce sera alors Romain Rolland qui essayera de les réconcilier, demandant à l'un et à l'autre de relativiser leurs "élans" : Zweig doit comprendre que les atrocités existent et Verhaeren doit accepter le principe que la guerre crée des excès mais que la culture doit rester de mise pour vivre au-dessus des contingences matérielles !!! Toujours est-il que Verhaeren va mourir en 1916, sans réconciliation possible.
Zweig va reprendre contact avec Marthe Verhaeren en 1923 car il souhaite continuer à défendre l'oeuvre d'Emile dans son pays.
Cette correspondance montre combien l'Histoire peut venir perturber des relations amicales. Elle est surtout intéressante pour s'imprégner des relations culturelles entre la Belgique et l'Allemagne-Autriche au début du 20e siècle. Verhaeren étant d'origine flamande et bien qu'écrivant en français, il était considéré comme un germanophile et Zweig a beaucoup joué là-dessus pour le rendre célèbre, faisant remarquer que la France l'appréciait avec frilosité.
Stefan Zweig a écrit toutes ses lettres à Verhaeren en français, plutôt de bonne facture, ce qui est à noter et en fait un francophile.
Un bon moment de "littérature européenne" que cette correspondance.
Denis
Livre qui s'inscrit dans le challenge "littérature francophone d'ailleurs"
Et également dans sa déclinaison spécifique
pour le mois de janvier 2014 en littérature belge francophone :