22 mars 2015
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Jacob, Jacob de Valérie Zenatti
(Editions de l'Olivier - août 2014 - 166 pages)
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4e roman de Valérie Zenatti publié aux Editions de l'Olivier e pour cette auteure née à Nice en 1970, par ailleurs traductrice de Aharon Appelfield, l'immense auteur israélien.
L'écriture est magnifique, disons-le d'entrée, alternant des phrases longues et des phrases plus courtes, toujours avec un ton juste.
Jacob, 19 ans, prend son dernier repas en famille avant de partir pour l'armée et sans doute pour la guerre en 1944.
Nous sommes à Constantine en Algérie et Jacob Melki est le grand-oncle de l'auteur. L'auteure prend appui sur une photo et sur quelques souvenirs familiaux pour écrire ce roman.
Jacob est juif comme les siens et il a eu quelques déboires à l'école à cause des lois de Vichy applicables ici aussi. Et quand on l'appelle pour aller défendre la France, il se rappelle que la France s'intéresse aux juifs quand nécessaire. Toutefois, il ne rechigne pas et après être passé par le Hoggar il se retrouvre à Alger pour embarquer pour la Provence où il doit participer au débarquement d'août 1944. Sa mère, Rachel, ne supporte pas vraiment cette séparation alors que Jacob est son fils préféré et elle craint pour sa vie. Alors, elle décide d'aller à sa rencontre avant qu'il ne quitte la terre algérienne. Malheureusement, elle arrive toujours trop tard.
Jacob ne se sent pas très à l'aise dans ce monde militaire : (page 44) "... Il voudrait se souvenir d'un poème, il en a appris tant par coeur, mais depuis qu'ils sont dans le Hoggar, soldats de l'armée française, la mémoire des poèmes s'est enrayée, il bute contre les mots qui fourmillent dans une sarabande anarchique, il se souvient pourtant de ceux qui les ont écrits, Hugo, Rimbaud, Baudelaire, il voit même leurs visages, mais seulement leurs visages, comme si ce qu'ils avaient écrit pouvait être anéanti par le soleil du Hoggar, les ordres du sergent-chef, les nuits glaciales. (...) les vers ici, ne trouvent pas leur place, ils jurent avec les uniformes, sont réduits au silence par les armes et le nouveau langage aux phrases brèves et criées qui est le leur".
Jacob a heureusement de fidèles amis mais la guerre va faire ses ravages entre le temps du débarquement et celui de l'arrivée en automne en Alsace où les combats continuent à faire rage. Il va connaitre l'amour le temps d'une nuit à Lyon et la mort autour de lui. Pendant ce temps, sa famille continue à vivre à Constantine dans l'attente de nouvelles. Ils écoutent la radio espérant que Jacob sera cité pour l'honneur et la fierté de la famille... Le roman se termine avec la guerre d'Algérie et le départ pour la France où les survivants de la famille n'ont plus aucun espoir dans ce pays dévasté où la haine prévaut...
Un très grand et beau roman sur fond historique restitué avec pudeur, en hommage à une famille déracinée loin de ses origines en Israël...
Bonne lecture,
Denis