A la recherche du temps perdu de Marcel Proust (Bibliothèque de la Pléiade)
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Suite de ma lecture du tome 1 d'A la recherche du temps perdu de Marcel Proust
http://bonheurdelire.over-blog.com/article-a-la-recherche-du-temps-perdu-de-marcel-proust-tome-1-pleiade-120589032.html
je viens d'achever le tome 2 qui contient les volumes suivants :
- Le côté de Guermantes
- Sodome et Gomorrhe
Et toujours en lisant 10 pages par jour.
Dans ces volumes Proust, par la voix de son narrateur, aborde régulièrement les manières de parler des uns et des autres. Ainsi, il analyse le langage de Françoise, l'employée de la maison. Le directeur de l'hôtel de Balbec déforme les mots qu'il emploie...
Les noms de lieux sont également passés au crible de l'éthymologie.
Et puis surtout, on reste dans les mondanités tout au long de ces deux textes. Proust ne se privant pas de critiquer ce monde qui se croit cultivé et qui connait à peine Balzac. Ils aiment dire des banalités mais il faut se montrer, être là.
Sodome et Gomorrhe présente un nouveau thème : celui de l'homosexualité. M. de Charlus qui, un soir, a humilié le narrateur se révèle être homosexuel, arrangeant des rencontres avec Jupien son giletier par exemple.
Il soupçonne aussi son amie Albertine d'aimer les jeunes femmes. Ses relations avec elle sont difficiles. Il en fait sa fiancée, appréciant être avec elle. Mais sa jalousie habituelle fait qu'il la retient au maximum pour qu'elle n'aille pas voir ses amies. Sa mère va d'un mauvais oeil sa relation avec Albertine. Il envisage de la quitter d'ailleurs au cours de son séjour d'été à Balbec, mais il se ravise.
On va chez les Guermantes à Paris et chez les Verdurin à Balbec, du moins dans la campagne proche. Et prendre le train est une belle aventure, quand on ne prend pas la voiture décapotable conduite par un chauffeur, car bien sûr on reste mondain même ici.
Résumer 1 000 pages est impossible surtout que chez Proust l'action n'est pas le principal de son récit. On peut rester des dizaines de pages à la même soirée où l'on parle, l'on écoute et pour beaucoup on se montre. Ce sont les mots de Proust qui nous portent dans ce monde fermé mais passionnant quand on prend l'angle du narrateur très critique, réaliste.
Page 668 : "Tout en marchant à côté de moi, la duchesse de Guermantes laissait la lumière azurée de ses yeux flotter devant elle, mais dans le vague, afin d'éviter les gens avec qui elle ne tenait pas à entrer en relations, et dont elle devinait parfois, de loin, l'écueil menaçant. Nous avancions entre une double haie d'invités, lesquels, sachant qu'ils ne connaîtraient jamais "Oriane", voulaient au moins, comme une curiosité, la montrer à leur femme : "Ursule, vite, vite, venez voir madame de Guermantes qui cause avec ce jeune homme"".
Page 1011 : "Malheureusement pour M. de Charlus, son manque de bon sens, peut-être la chasteté des rapports qu'il avait probablement avec Morel, le firent s'ingéner, dès cette époque, à combler le violoniste d'étranges bontés que celui-ci ne pouvait comprendre et auxquelles sa nature, folle dans son genre, mais ingrate et mesquine, ne pouvait répondre que par une sécheresse, ou une violence toujours croissantes, et qui plongeaient M. de Charlus - jadis si fier, maintenant tout timide - dans des accès de vrai désespoir".
Le narrateur n'est jamais omniscient. Il a des doutes sur les relations des uns et des autres. Mais voilà, les phrases souvent longues et sinueuses opèrent un charme fou sur le lecteur, car on sait avec Proust qu'il faut prendre son temps, le suivre dans les méandres de sa pensée.
Le 1er mars, j'entame le dernier tome qui fait aussi plus de 1 000 pages, ce qui me fera terminer l'oeuvre entier pour la mi-juin. Un an de bonheur de lecture avec ce texte tellement original dans son traitement littéraire. Un livre unique qui ne nous quitte pas.
Bonne lecture
Denis